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Charlie-Hebdo, la coupe est pleine : il faut constitutionnaliser les principes de 1905 !
L'incendie qui a ravagé cette nuit du 2 novembre 2011 les locaux de Charlie-Hebdo, à la suite de l'annonce de la parution d'un numéro intitulé « Charia Hebdo », marque un tournant et appelle, au-delà du soutien populaire à la liberté d'expression, une campagne de constitutionnalisation des principes de la loi de 1905.
D'abord un tournant dans la violence : rarement un organe de presse avait été attaqué physiquement de façon aussi violente en France. Cela rappelle bien sûr les caricatures de Mahomet au Danemark, l'assassinat de Theo Van Gogh aux Pays-Bas, les menaces de mort à l'encontre de Robert Redeker, les appels à l'interdiction de films, d'expositions ou de spectacles. Mais au-delà de ces événements visibles, combien d'intimidations, de menaces, de pressions sur des personnes, des commerces, des opinions, pour motif religieux ?
Un tournant dans l'opinion. Rares et peu audibles sont les voix qui s'élèvent aujourd'hui pour excuser ou du moins « comprendre » cette violence et ces appels à la censure, au nom du « respect » qui serait dû à une « sensibilité religieuse » ou même à la notion de religion en général. Tel n'était pas le cas il n'y a pas si longtemps : on rappellera les réticences chichiteuses devant le soutien à apporter à Robert Redeker (1).
Mezetulle vient de publier un article de réflexion sur la notion de religion d'Etat : ça tombe mal m'objectera-t-on ! Au contraire : j'y examine les conditions auxquelles une religion officielle peut être compatible avec un régime respectueux des libertés fondamentales. Et j'y énonce expressément un critère décisif permettant d'en juger : que chacun puisse se détourner de la bienpensance normalisatrice (qu'elle soit ou non religieuse) en publiant et en affichant des opinions contraires sans risquer sa vie, sa sécurité, sa liberté ou ses biens.
Ce qui vaut en régime tolérant reconnaissant une religion officielle (par exemple au Royaume-Uni, en Norvège, etc.), vaut a fortiori et est encore plus facile à faire respecter en régime de laïcité. Pourquoi ? Parce que le régime de laïcité assure d'abord la liberté de conscience, dont la liberté des cultes n'est qu'un cas particulier : non seulement aucune religion ne peut y jouir d'un statut officiel, mais encore le fait même d'avoir une religion n'y est pas présenté comme une norme, ni comme plus digne de respect qu'une autre opinion. Que l'opinion religieuse jouisse du même statut et des mêmes libertés que n'importe quelle autre, ni plus ni moins, c'est ce que ne supportent pas les tenants d'une hégémonie religieuse expansionniste - quelle qu'elle soit.
Cette heureuse disposition tient pourtant essentiellement à deux phrases de ce qui n'est qu'une loi, votée en 1905, et dont certains voudraient faire un « toilettage ». Une loi se défait et se détricote assez facilement.
Il est urgent de lancer une campagne pour constitutionnaliser les principes fondamentaux de la loi de 1905 : liberté de conscience, liberté des cultes, non-reconnaissance et non-financement des cultes quels qu'ils soient.
1 - Voir notamment sur ce blog : La double fatwa. De l'islamo-progressisme