17 avril 1970 5 17 /04 /avril /1970 01:00

La double fatwa
De l’islamo-« progressisme » comme dispositif de pensée
par Catherine Kintzler         en ligne le 23 octobre 2006

(voir le premier article : Redeker mort ou vivant ?)

Comme dans l’affaire des caricatures, une seconde fatwa s’abat sur Robert Redeker. Véritable peine infamante, l’opprobre des temps modernes se déchaîne : n’aurait-il pas, tout de même, tenu des propos « racistes », « islamophobes » ? On analyse ici le mécanisme de cette seconde fatwa. A une première opération qui transforme la victime en coupable s’ajoute un dispositif prétendument altruiste qui caractérise le phénomène récent de l’islamo-« progressisme ».



Non seulement la tête de Robert Redeker, visé par une fatwa "de protestation" lancée par le cheikh islamiste Youssef al-Qaradawi et immédiatement traduite en appel au meurtre par le zèle fanatique, est mise sous contrat meurtrier, non seulement il est, au motif légitime de sa protection, en état de réclusion hors droit, mais encore il subit une seconde fatwa de nature morale. Comme dans l’affaire des caricatures, une véritable peine infamante, opprobre des temps modernes, se déchaîne sur lui, et - comble de perversité - à travers le mécanisme même de « soutiens » qui viennent l’achever comme la corde soutient le pendu, à travers même leur formulation habilement dubitative : n’aurait-il pas, tout de même, tenu des propos excessifs, « racistes », « haineux », « islamophobes » ? et pour les délicats qui répugnent à tremper les mains dans le cambouis idéologique, il existe une version propre, puisée dans la consensuelle distinction entre doxa et pensée (c’est mon prof de philo qui me l’a apprise en me faisant lire Platon, alors…) : n’aurait-il pas, tout de même, tenu des propos de café du commerce, « indignes d’un professeur de philosophie » (1) ?
L’opération, qui réside dans le tout de même, n’a pas seulement pour effet de scier la branche qu’on lui tend, elle ramasse la mise et en décuple le montant par un large ratissage : ceux qui, comme moi, souscrivent à un soutien sans réserve se trouvent de ce fait discrédités et emportés par la stigmatisation infamante. Dans le pack du soutien sans réserve est ainsi inclus un cadeau empoisonné : le soupçon d’intolérance, de racisme, d’« islamophobie » et, cerise sur le gâteau, celui de vulgarité intellectuelle.
Or le puissant levier du tout de même n’est pas nouveau. On l’a vu fonctionner à l’identique dans l’affaire des caricatures ; il repose sur un mécanisme de conversion. On en connaît une variante fondamentale immémoriale qui transforme la victime en coupable : « l’argument du violeur ». S’y ajoute une variante plus raffinée, une conversion charitable à effet politique permettant de caractériser un phénomène récent : l’islamo-« progressisme ». Ce terme ne désigne nullement un parti (comme l’expression « islamogauchisme » que j’ai naguère employée peut le faire croire à tort) ni un mouvement politique organisé, mais un dispositif de pensée.


1 - La première et la seconde fatwa : la juridiction d’exception et l’argument du violeur

Et d’abord, pourquoi parler de « fatwa » ? On me dit qu’un tel décret ne peut viser qu’un musulman et qu’il faudrait donc s’abstenir ici de l’usage du terme. Mais je réponds qu’il faudrait même s’en abstenir complètement, y compris s’il s’agit d’un musulman puisque aucune juridiction religieuse n’est légitime en France : ceux qui critiquent l’usage du terme pour un non-musulman auraient-ils accepté la légitimité d’une juridiction d’exception pour une portion de la population, la mettant ainsi à l’écart et négligeant les divisions qui peuvent exister en son sein ? C’est faire bon marché des musulmans laïques, les livrant sans état d’âme à des lois exorbitantes qui les soustraient aux garanties ordinaires (2).
On voit bien alors ce que dit le mot « fatwa » : il dit qu’il existe une juridiction d’exception, en l’occurrence d'origine religieuse. Et s’il existe une juridiction religieuse capable d’exécuter les peines qu’elle prononce, c’est qu’une juridiction exorbitante s’exerce de fait en France, contrariant et bafouant la seule qui devrait s’exercer. Ce qui est le cas : comme Rushdie, Redeker est dans une zone de non-droit, privé de la seule liberté qui vaille parce qu’elle conditionne toutes les autres, la liberté de son corps. Il est bien sous le coup d’une « fatwa », celle de l’islamisme intégriste, fatwa simple et directe, la première fatwa. Elle s’exerce partiellement certes puisque Redeker a la vie sauve, mais néanmoins réellement puisqu’il est hors du droit ; d’ailleurs ceux qui prétendent qu’il s’agit d’une fiction se gardent bien de dire et d’écrire qu’il devrait aller et venir sans crainte et sans protection.

La seconde fatwa, décret d’infamie, reprend le fonctionnement de la première par un consentement à l’exception, lequel réside dans le tout de même. Qu’elle l’atténue parce que la conséquence de la première lui fait horreur ne modifie pas la structure de ce fonctionnement.
Pour le mettre en évidence, tirons d’abord une chose au clair : il existe un arsenal juridique accessible et applicable à tous qui définit les délits d’abus de la liberté d’expression (notamment l’injure, l’appel à la violence, le racisme). Or à ma connaissance aucune plainte pour ce motif n’a été déposée contre R. Redeker, et quand bien même il en serait ainsi, c’est à la loi d’en juger. Tant que les termes « racisme » « insulte », etc., ne sont pas dans la bouche d’un juge prononçant une sentence, ils relèvent en l’occurrence d’un rapport de forces qu’on aurait qualifié naguère d’idéologique. Leur principal usage est alors infamant, transformant en délit ce qui relève de la simple opinion, convertissant en scandale ce qui relève du vrai et du faux. A plus forte raison pour les termes qui ne désignent aucun délit : « islamophobie » « prosionisme » : ils sont utilisés ici non pas comme concepts (ce qu’ils peuvent être en d’autres occasions), mais comme repoussoirs, comme révulsifs. Il n’y a pas si longtemps, « capitaliste » et « impérialisme » (qui sont aussi des concepts) fonctionnaient ainsi. Et que dire aujourd’hui de « colonialisme » ? On sait ce qu’il en a coûté à Olivier Pétré-Grenouilleau d’oser examiner l’esclavage comme concept et comme fait historique : très exactement un procès en infamie.
Or la fatwa d’infamie, le raisonnement du tout de même, reconduit en douceur le schéma de la première. En douceur : seulement pour certains cas (des exceptions, bien entendu), non pas en prononçant brutalement une peine et encore moins une peine de mort, mais en présentant le déni de droit directement affirmé par la première comme une chose à laquelle il y aurait un sens à s’identifier. On a beau avoir applaudi à l’abolition de la peine de mort, mais on aura tout de même assez de largeur de vue pour comprendre que certains, dans certaines circonstances, s’ils se sentent particulièrement insultés dans leur identité profonde, et parce que, eh bien vous savez, il y avait tout de même beaucoup de provocation de la part de l’autre, et que, au fond, entre nous, c’est un ramassis de propos de bistrot, pour comprendre finalement que certains y souscrivent (mais pas nous, évidemment). Le coup de boule de Zidane, version tragique  - l’Italien, qui a reçu le coup, l’avait sûrement bien cherché ?
On a sous les yeux une opération de conversion qui transforme la victime en coupable. Du même coup, le principe d’une juridiction d’exception est subrepticement introduit. Qui ne reconnaît dans ce mécanisme de culpabilisation de la victime l’argument du violeur ? « Elle m’a provoqué, elle l’a bien cherché ». Il a vraiment dû faire quelque chose de grave pour qu’une sentence aussi forte (mais, attention, je ne suis pas pour) pèse sur lui…La sagesse populaire, dans sa férocité, fournit deux dictons qui résument le parcours de la belle âme consentant au fusil pointé hors la loi sur un homme sans défense : « qui sème le vent récolte la tempête » et « il n’y a pas de fumée sans feu ».


2 - La conversion altruiste et l’islamo-« progressisme »

S’en tenir à ce premier mécanisme de conversion, fort connu, de la victime en coupable serait cependant négliger l’efficacité de la fatwa d’infamie. Il faudrait un Nietzsche pour en décrire le raffinement et l’inscrire en bonne place au tableau des célèbres renversements des valeurs, ou un Hegel pour en faire une figure de belle âme digne d’un moment de l’esprit. Je me contenterai d’en souligner l’effet principal, qui surgit par distinction avec l’argument du violeur. Car le violeur effectuant l’opération de conversion a pour unique intérêt de se sauver lui-même ; le mensonge qu’il met en place a pour objectif de le convaincre lui-même que ce n’est pas si grave et d’en convaincre les autres : le mécanisme du « comprendre, c’est excuser », se met en place sans médiation. Aucun mouvement sacrificiel ne vient s’y surajouter : s’il convertit la victime en coupable et ainsi apporte au crime des circonstances atténuantes, il ne convertit pas pour autant l’auteur du mensonge en héros…
Tel n’est pas le cas pour la fatwa morale. Son grand pouvoir, qui la transforme si aisément en opinion autorisée, partout répandue dans la presse comme ce qu’il est bon et généreux de penser, vient de ce que ses auteurs ne l’utilisent nullement pour eux-mêmes, mais qu’ils effectuent l’opération de conversion au profit d’autres ! L’opération ne s’inscrit pas au régime d’une défense immédiate : ils ne sont pas eux-mêmes les accusateurs, loin de là : ils sont des redresseurs de tort, des chevaliers qu’il faut remercier et qu’il est mal vu de ne pas rejoindre.
Cette opération, ils l’effectuent pour le bien de tous. N’est-il pas bienséant et hautement éducatif de dénoncer le racisme, la xénophobie ? N’est-il pas hautement éducatif de dénoncer la doxa pour célébrer la pensée, la vraie ? Il n’est pas impossible que, aujourd’hui, quelque professeur pénétré de bonnes intentions et pétri de bienpensance fasse une leçon dans sa classe, expliquant le texte de Redeker comme le type même de ce qu’il faut laisser au fond de la caverne, persuadé que ce lynchage est une salutaire mesure d’hygiène intellectuelle et morale.

Mais cet altruisme général n’épuise pas les vertus de la fatwa morale : en répandant le soupçon d’infamie au motif d’ « islamophobie » aussi bien sur l’auteur du texte que sur ceux qui soutiennent cet auteur sans réserve, on est au cœur brûlant d’une question contemporaine. Comment peut-on être assez méchant et diviseur pour critiquer une religion ? Passe encore pour le christianisme, la religion des oppresseurs – mais l’islam ! la religion des pauvres ! Comment peut-on ne pas « comprendre » qu’un musulman ne se sente pas insulté par des critiques aussi violentes au point d’en venir aux mains ?
Outre qu’il y a dans ce mécanisme d’amalgame un souverain mépris – car il s’efforce de coaliser « les musulmans » autour d’une minorité dogmatique et intégriste à laquelle il sont sommés de s’identifier, comme s’ils devaient, du fait même de leur religion, être plus sensibles et plus réactifs que d’autres, comme s’il fallait faire exception pour eux, comme s’il n’y avait pas aussi des « musulmans athées », comme si, issu de culture musulmane, on n’avait pas le droit de lui être indifférent ou hostile, - le dispositif de la pensée dont il s’autorise rappelle d’autres moments tout aussi tragiques. Comment pouvait-on être assez pervers pour critiquer l’URSS et introduire ainsi une division inopportune, comment pouvait-on manquer de « conscience politique » au point de dire que le goulag est un pur et simple camp de concentration ? Une certaine idée du progrès veut, aujourd’hui comme hier, que l’on se rassemble sans faille autour de ceux dont on a décrété qu’ils sont l’emblème des opprimés : tout ce qui s’en écarte est donc du côté de l’oppresseur. Ainsi l’islamo-« progressisme », comme naguère la « conscience politique », n’est pas un parti, ni même un corps de doctrine, mais un dispositif de pensée qui, au prétexte de secourir une figure emblématique de la souffrance qu’on a qualifiée et unifiée a priori, s’érige en valeur morale inquisitoriale et forme autour de lui un rempart de bonnes opinions.

"Tant de fiel entre-t-il dans l’âme des dévots ?" Boileau, Le Lutrin, chant I (3).

© Catherine Kintzler, 2006


Notes

1 – Au sujet du soutien sans réserve qui suspend l’espace critique, on a examiné dans un précédent article Redeker mort ou vivant ? la question de la légitimité de la critique s’agissant d’un homme vivant placé en état de réclusion tel qu’il ne peut plus participer au débat que comme un mort. On y trouvera les raisons de notre refus d’entrer actuellement dans le contenu du texte de RR.


2 - On me dit aussi que la "fatwa" visant Redeker était de "protestation" ou qu'"il n'y a pas de fatwa"... et donc ce n'est pas si grave, j'ai tout faux ! Mais l'index qui le pointe a immédiatement et directement été converti en menaces de mort : faut-il entrer dans les subtilités d'un raisonnement religieux pour établir une distinction entre des menaces qui seraient plus réelles que d'autres parce que plus "orthodoxes"? Je revendique le droit de n'avoir rien à connaître de cette orthodoxie (et surtout rien à lui reconnaître) et de m'en tenir à la réalité des menaces à motif religieux. J'use donc du terme "fatwa" comme d'un mot passé dans l'usage courant dans la langue française, qui désigne une décision à motif religieux exorbitante au seul droit applicable et reconnu. Et qu'on ne vienne pas me dire que seules des autorités religieuses sont aptes à user d'un terme ou à en imposer un usage "correct" : la langue n'a que faire de cela. C'est ainsi que ce matin, j'ai entendu sur France-Info une chronique technique dire d'un téléphone portable incompatible avec certains logiciels qu'il était très peu "oecuménique" : on comprend parfaitement ce que le chroniqueur voulait dire, et aucun pape n'a encore protesté...[Note du 24 octobre 06]


3 - Sur l’origine de ce vers, voir les notes de l’article L’épopée des ours dénaturés.

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commentaires

R
excellent article, je me suis permise de vous inscrire en lien permanent sur mon blog
D
Bonjour,<br /> Pourquoi ne reprendriez-vous pas votre brillante analyse dans une réfutation en règle d'un article de Pierre Marcel (Libération) daté d'aujourd'hui ?<br /> Voici l'article :<br /> Quotidienne<br />  <br /> <br /> "Terrorisme et demi"<br />  <br /> <br /> Par Pierre MARCELLE<br />  <br /> <br /> QUOTIDIEN : jeudi 23 novembre 2006<br />  <br /> <br /> Comment dire ça ? (Et déjà vous devez sentir à ce commencement, lecteurs, la pression occulte d'un début de presque autocensure.) Comment dire que, contrairement à ce que de très vaines ­ ou très paranoïaques, ou très malveillantes ­ personnes pensent ou font semblant de penser, le sort de Robert Redeker ne m'indiffère pas absolument, non plus qu'il n'indiffère nombre de mes amis, dont le «gauchisme» vilipendé serait synonyme de complaisance avec les tordus d'un islam «radical». C'est juste qu'eux et moi aimerions comprendre enfin quelle menace pèse sur le professeur de philo qu'une protection policière a soustrait à ses élèves et à ses proches, depuis qu'il signa dans le Figaro une tribune parangon de la liberté de l'esprit, dit-on, contre l'infâme barbu. Deux mois que ça dure ; le micro-anniversaire a fourni mardi dans ces pages l'occasion de pétitions de principe très légitimes, mais qui violentent un peu le principe de réalité. Dire, donc, avec une pédagogique courtoisie, à l'avocat Gyslain Di Caro, que l'Opéra de Berlin est revenu sur sa décision de déprogrammer l' Idomeneo de Mozart, au prétexte qu'il offusquerait l'islamiste sensibilité ­ ce que la police allemande démentit. S'irriter un peu, aussi, lorsque le radotant Pascal Bruckner, confondant le règlement de ses comptes privés ou imaginaires avec la lumière de Voltaire, vient faire à qui n'adhère pas à sa croisade d'extravagants procès d'intention. Prôner comme il fait à l'endroit de Redeker «une solidarité inconditionnelle» tout en précisant «quoi qu'on pense de l'article incriminé» est inepte (car tautologique); dater le mot islamophobie de «la fin des années 70» en Iran insulte la lexicologie ; accuser les sceptiques de redoubler une «fatwa» elle-même indéterminée est délirant ; tripoter sources et citations est malhonnête, et parler en cette ténébreuse affaire de «collabos» et de «résistants», risible. Ne rirait-on pas de même si j'identifiais ici, dans les mots de grand inquisiteur de Bruckner, une autre forme de terrorisme ?<br />  <br /> <br />  
C
Une version remaniée de ce texte (qui reprend également les thèses principales de l'article précédent Redeker mort ou vivant ?) paraîtra dans un prochain numéro des Temps modernes, dans un dossier consacré à l'affaire Redeker. Je profite de cette annonce pour remercier Claude Lanzmann et la rédaction des TM de m'avoir proposé de participer à ce numéro.
V
J'ai découvert cet article et ce blog par la même occasion grâce à Polluxe<br /> D'abord merci pour cet article . Je retiens en particulier l'idée que la fatwa étant inacceptabl il n'y a pas lieu pour en juger d'examiner le texte de RR.<br /> Le principe d'une entité différente de l'Etat édictant des condamnations à mort (ici une entité religieuse) est exactement celui qui est pratiqué par des entités mafieuses qui veulent imposer leur propre loi: à cet égard , elle doit être refusée sans nuances par tout partisan de notre démocratie 
C
Votre comparaison avec une décision maffieuse est tout à fait éclairante. C'est la même prétention à installer une règle au-dessus des lois, avec rétablissement de la "peine" de mort. : un empire exempté du droit au coeur même de l'Etat de droit.Seulement les décisions islamistes intégristes bénéficient, en outre, de trois opérations islamo-"progressistes" : 1° conversion de la victime en coupable (l'argument du violeur),  2° transformation de ceux qui soutiennent la victime en affreux  "islamophobes" (mécanisme de la "seconde fatwa"), 3° conversion de ceux qui effectuent les deux opérations précédentes en chevaliers redresseurs de torts (renversement des valeurs) ! C'est fort quand même ! ;-)
P
Très bonne analyse qui permet de clarifier la situation. Je l'ai mise en lien sur mon blog . Pas facile au demeurant de ne pas tomber dans le piège des mots : http://polluxe.free.fr/wordpress/?p=136<br />  
C
Je me permets de citer ce texte, que j'ai reçu par mél de l'un(e) de mes correspondant(e)s, qui me donne l'occasion d'une mise au point nécessaire."Encore un superbe texte, très éclairant. En effet, l'"argument du violeur" (comme vous le décrivez si bien), est insuffisant en la circonstance - quoique souvent utile en un premier temps. Mais vous faites vraiment avancer la réflexion dans votre analyse de l'islamo-gauchisme comme dispositif de pensée ( et pas seulement, comme on a tendance à le dire, comme parti pris militant). C'est même pour cela   qu'il va si loin, et atteint tant de gens, ni militants, ni même politisés. Je vais bien sûr faire circuler cet article, qui nous apporte beaucoup, à tous. Juste un mot : vous parlez de fatwa au sens large : mise au pilori d'une personne au nom de l'intégrisme islamiste. Néanmoins, ce n'est pas ainsi que les journalistes l'évoquent, mais comme une condamnation à mort, analogue à celle qui frappa Rushdie, ou Taslima Nasreen, prononcée par un dignitaire musulman. Ce n'est pas ce qui s'est produit pour Redeker (voir la mise au point de Caroline Fourest à ce sujet - ou plutôt, disons que la fatwa aujourd'hui s'est démocratisée et mondialisée, et que n'importe qui n'importe où aujourd'hui se permet d'en lancer : ce fut le cas pour Théo van Gogh notamment. Par contre, les sites d'extrême-gauche ne se privent pas de critiquer le terme, de ricaner (" pourquoi tout ce tumulte alors que RR n'a même pas une fatwa ?"), d'y voir une preuve de plus d'une "manipulation".  Dernière remarque : le "professeur pénétré de bonnes intentions et pétri de bienpensance " que vous anticipiez n'était nullement un fantasme : il est arrivé depuis hier dans l'Huma (http://www.humanite.presse.fr/popup_print.php3?id_article=839056). Et ce n'est, sans doute, que le premier."La lecture de l'article de Caroline Fourest cité par mon correspondant et en effet très éclairante, et c'est à la suite de cette lecture que j'ai ajouté la note (2) à mon texte, afin de rester précise. Il en résulte notamment que toutes les tentatives de banalisation des menaces de mort qui pèsent sur RR sont déplacées : la "fatwa" de "protestation" n'a pas été simplement interprétée par quelques individus isolés, mais bel et bien convertie en appel organisé au meurtre sur les sites internet fanatiques où la photo, les coordonnées privées et professionnelles de Redeker et de ses proches ont été divulgées avec appel clair à le tuer. Sans compter qu'elles sont en elles-mêmes ignobles, et cette ignominie est bien soulignée par mon correspondant : il n'y a pas de quoi en faire un fromage puisque ce n'est "même pas" une fatwa ! Dans ce superbe raisonnement, on ne sait ce qu'on doit détester le plus : la minimisation d'un appel au meurtre ou la légitimation d'une autorité religieuse capable de lancer de tels ordres... Je renvoie les lecteurs à cette note (2) de mon article. Je ne renonce pas pour autant à l'emploi du mot "fatwa" comme mot reçu dans l'usage contemporain ordinaire de la langue française et au droit d'en faire un emploi aussi bien propre que métaphorique : ce mot n'est pas la propriété exclusive des autorités islamiques et islamistes, pas plus que le mot "oecuménique" ou le mot "index" ne sont la propriété exclusive des autorités chrétiennes. Comme tous les autres mots, son emploi est formé par l'usage, lui-même ouvert au débat et à la réflexion critique.
I
Bravo pour ce texte, qui devrait libérer quelques âmes tourmentées. J'ajoute un trait au portrait de la belle âme islamo-progressiste : Si Redeker, dit-elle d'un air entendu, est louche, s'il sent le soufre, c'est parce qu'il est l'un des vecteurs de la théorie du choc des civilisations en France. Vous l'ignoriez ? Redeker est bushiste ! Cela mérite bien une fatwa morale.
J
Je vous soutiens complètement dans votre dénonciation de ce soi-disant progressisme qu'est "l'islamo-progressisme". La taupe Tarik Ramadan fait son travail de sape. Il faut réagir. Vous le faites très bien.M'autorisez-vous à reproduire votre article sur mon blog?J'ai déjà mis un lien permanent "Catherine Kintzler" mais les textes très importants comme celui-ci méritent la diffusion la plus large.
C
Merci de reprendre et de diffuser ce texte, je ne demande que cela !(Il y a également un lien vers votre blog dans la page "Liens" de Mezetulle.)

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