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« Mariage homosexuel » ou le même mariage indifférent au sexe des conjoints ?
Comme presque tout le monde, y compris les plus hautes autorités, Mezetulle se surprend à utiliser couramment l'expression « mariage homosexuel » pour désigner le mariage entre deux personnes de même sexe. L'expression est-elle bien appropriée pour désigner le même mariage (avec mutatis mutandis les mêmes prohibitions, une fois abolie la condition de différenciation de sexe) et cet usage spontané n'est-il pas un témoin de la communautarisation des esprits?
En toute rigueur, un mariage homosexuel serait spécifiquement réservé aux homosexuels, et donc non seulement il différerait d'un autre mariage, mais il serait un marqueur différentialiste. Or est-ce bien ce qu'on soutient lorsqu'on se déclare favorable (comme je le suis) à l'abolition de l'exigence d'être de sexe différent pour contracter le mariage ? Pas du tout ! On réclame le contraire : l'égalité entre couples de même sexe et couples de sexe différent au regard de l'institution du mariage, la question du sexe devenant alors indifférente.
Je conclus qu'on peut être réservé devant l'expression « mariage homosexuel » précisément parce qu'on pense que le mariage - le même mariage - doit pouvoir unir des personnes indifféremment de leur sexe ! Je conclus aussi que la loi qui doit être présentée en ce sens au début de 2013 ne devrait pas faire mention du sexe des personnes. Que nos législateurs optent pour une version minimaliste qui tout simplement abolirait la condition de différenciation de sexe (et qui n'ajouterait à la loi que ce qui est nécessaire pour adapter les prohibitions en vigueur) je n'en mettrais pas ma main à couper.
Un autre point intéressant sera de voir comment seront rédigées les adaptations des prohibitions relatives à la parenté, et comment les anthropologues les rapporteront à la thèse de la prohibition de l'inceste. A cet égard, on espère que le superbe livre de Françoise Héritier Les deux soeurs et leur mère. Anthropologie de l'inceste (Paris : Odile Jacob, 1994), que je tiens pour un des plus grands ouvrages scientifiques du XXe siècle, trouvera de nouveaux lecteurs.
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