4 août 2012 6 04 /08 /août /2012 16:13

Bloc-notes actualité
« Mariage homosexuel » ou le même mariage indifférent au sexe des conjoints ?

En ligne le 4 août 2012


Comme presque tout le monde, y compris les plus hautes autorités, Mezetulle se surprend à utiliser couramment l'expression « mariage homosexuel » pour désigner le mariage entre deux personnes de même sexe. L'expression est-elle bien appropriée pour désigner le même mariage (avec mutatis mutandis les mêmes prohibitions, une fois abolie la condition de différenciation de sexe) et cet usage spontané n'est-il pas un témoin de la communautarisation des esprits?

En toute rigueur, un mariage homosexuel serait spécifiquement réservé aux homosexuels, et donc non seulement il différerait d'un autre mariage, mais il serait un marqueur différentialiste. Or est-ce bien ce qu'on soutient lorsqu'on se déclare favorable (comme je le suis) à l'abolition de l'exigence d'être de sexe différent pour contracter le mariage ? Pas du tout ! On réclame le contraire : l'égalité entre couples de même sexe et couples de sexe différent au regard de l'institution du mariage, la question du sexe devenant alors indifférente.


Je conclus qu'on peut être réservé devant l'expression « mariage homosexuel » précisément parce qu'on pense que le mariage - le même mariage - doit pouvoir unir des personnes indifféremment de leur sexe ! Je conclus aussi que la loi qui doit être présentée en ce sens au début de 2013 ne devrait pas faire mention du sexe des personnes. Que nos législateurs optent pour une version minimaliste qui tout simplement abolirait la condition de différenciation de sexe  (et qui n'ajouterait à la loi que ce qui est nécessaire pour adapter les prohibitions en vigueur) je n'en mettrais pas ma main à couper.


Un autre point intéressant sera de voir comment seront rédigées les adaptations des prohibitions relatives à la parenté, et comment les anthropologues les rapporteront à la thèse de la prohibition de l'inceste. A cet égard, on espère que le superbe livre de Françoise Héritier Les deux soeurs et leur mère. Anthropologie de l'inceste (Paris : Odile Jacob, 1994), que je tiens pour un des plus grands ouvrages scientifiques du XXe siècle, trouvera de nouveaux lecteurs.

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commentaires

M
<br /> Message pour Jérémy.<br /> <br /> <br /> Merci de me donner une adresse mél valide, je vous ai envoyé deux méls sans succès ! Il est plus simple d'utiliser le formulaire de contact pour cela et non le formulaire de commentaire.<br /> <br /> <br /> Bien cordialement, CK<br />
A
<br /> "Outre l'aspect symbolique, le mariage offre des possibilités de<br /> transmission des biens entre conjoints..."<br /> <br /> <br /> C'est effectivement tout un symbole. <br />
A
<br /> Je ne saisis pas bien ce qui pose problème à certain(e)s homosexuel(le)s, puisqu'en France du moins, parrallèlement à l'institution du mariage existe l'union libre (avec ou sans<br /> aménagement). <br /> <br /> <br /> C'est curieux de revendiquer la reconnaissance d'un choix différence d'une part - ce qui est parfaitement légitime - et de s'obstiner à vouloir le mouler dans une institution séculaire et<br /> néanmoins rigide d'autre part.  <br /> <br /> <br /> Pourquoi ne pas proposer autre chose, ce qui aurait le mérite d'être clair pour tout le monde.<br />
M
<br /> <br /> Outre l'aspect symbolique, le mariage offre des possibilités de transmission des biens entre conjoints que n'offrent pas les autres formes d'union entre deux personnes, et (à ma connaissance) le<br /> mariage est nécessaire pour le droit à réversion de pension de retraite en faveur du conjoint survivant...<br /> <br /> <br /> <br />
J
<br /> Citation 1 : "Cette revendication prouve que nous sommes dans une société de capricieux, de personnes qui réclament le droit à la différence mais ne veulent pas assumer les conséquences de leur<br /> différences."<br /> <br /> <br /> Dans le genre "jugement à l'emporte-pièce", vous vous posez là... Ca fait plus de 50 ans que les LGBT réclament l'égalité des droits, et vous appelez ça "un caprice" ? C'est facile de mépriser et<br /> de rejeter une revendication qui ne vous concerne pas. Mais refuser des droits à des gens alors que ces droits ne retirent rien à personne, c'est du sadisme pur et de la bêtise.<br /> <br /> <br /> Quant à la différence, elle n'est pas choisie mais subie : le "droit à la différence" ne signifie pas que cette différence doive légitimer toute forme de discrimination, d'inégalité ou<br /> d'injustice à l'égard des gens qui vous semblent "différents" de vous.<br /> <br /> <br /> Citation 2 : "La seconde raison de mon opposition est que les gens ne comprennent pas vraiment pourquoi l'institution du mariage a été fondée. Le mariage, dans une période où l'économie familiale<br /> était toute puissante, visait à protéger la filiation. En gros cela permettait de rassurer l'homme sur sa paternité. Or ce que vise les associations de défense des droits des homosexuels en but<br /> ultime est de s'attaquer à la filiation. La notion de présomption de parentalité permet d'avoir pour présumés parents deux homosexuels et d'effacer ou rayer de la carte l'un des géniteurs de<br /> l'enfant."<br /> <br /> <br /> Alors interdisez le mariage aux personnes stériles, aux couples qui ne veulent pas d'enfants, aux femmes de plus de 50 ans, etc. Ou alors, réfléchissez un peu.<br /> <br /> <br />  <br />
T
<br /> Bonjour,<br /> <br /> <br /> cela m'étonne que vous soyez en faveur du mariage indifférent au sexe. <br /> <br /> <br /> Pour ma part j'y suis opposé pour deux raisons. <br /> <br /> <br /> La première vient du fait que cette revendication prouve que nous sommes dans une société de capricieux, de personnes qui réclament le droit à la différence mais ne veulent pas assumer les<br /> conséquences de leur différences. Oui, à part procédérer au clonage, deux homosexuels ne peuvent faire un enfant ensemble, c'est comme ça.<br /> <br /> <br /> La seconde raison de mon opposition est que les gens ne comprennent pas vraiment pourquoi l'institution du mariage a été fondée. Le mariage, dans une période où l'économie familiale était toute<br /> puissante, visait à protéger la filiation. En gros cela permettait de rassurer l'homme sur sa paternité. Or ce que vise les associations de défense des droits des homosexuels en but ultime est de<br /> s'attaquer à la filiation. La notion de présomption de parentalité permet d'avoir pour présumés parents deux homosexuels et d'effacer ou rayer de la carte l'un des géniteurs de l'enfant. <br />
I
<br /> Merci pour le lien... pff, encore 36 ans à attendre pour que les citoyens intègrent un sur-moi sans plus avoir besoin de la reconnaissance du groupe social par la loi... ça va être long, et je ne<br /> suis pas sûr que je verrai cette révolution... <br /> <br /> C'est dingue ce besoin de reconnaissance sociale de toutes les segmentations humaines... être comme "tout le monde", ou pire imposer à tous, ce que l'on est... décidément, les problèmes<br /> d'identité ne sont pas près de nous foutre la paix et d'encombrer les débats démocratiques... même si bien entendu, je ne vois aucun obstacle à ce que les homosexuels obtiennent le droit d'être<br /> aussi réac que le reste du monde... Je trouve juste qu'ils se trompent de combat...<br /> <br /> Le mariage civil comme rempart et défense contre "l'ordre moral" réactionnaire et liberticide des religieux, oui, pourquoi pas... Cela me rappelle quelques débats que nous avons déjà eus, sur<br /> l'utilisation et la finalité de la loi...<br /> <br /> Je pense qu'une Constitution et des lois bien faites, justement sur la défense et la liberté des individus, nous éviteraient d'avoir des lois qui se prononceraient sur les fondements du<br /> mariage...<br /> D'ailleurs, dans la dernière tentative de réforme de 2004, il était question de supprimer le "divorce pour faute" (ce qui aurait été une vraie avancée à mon sens), et on<br /> doit à la levée de boucliers des ligues familiales et religieuses, le fait que cette évolution soit passée à la trappe... ces derniers arguant que si le divorce pour faute n'existe plus, alors<br /> les "devoirs" du mariage seraient vidés de tout fondement et substance... et ils ont raison, dans leur système de cohérence...<br /> Sauf que vous voyez bien que le maintien dans la loi de la notion de faute entre époux est précisément ce qui justifie tout également tous les comportements les plus réactionnaires et le fait que<br /> le mariage reste une institution régressive, théâtre de tous les abus (notamment masculins) entre humains...<br /> Plus de faute entre époux, donc plus de procès pour mensonge sur la virginité... et plus tard plus besoin de mariage civil... La Loi républicaine étant au-dessus de celle des différents "ordres<br /> moraux", ça serait un sacré coup de pied dans la fourmilière, toute loi morale édictée en contradiction avec les lois républicaines devenant nulle et caduque...<br />
I
<br /> C'est un argument philosophique et politique de justifier le mariage civil, parce que vous êtes assez "vieux jeu" ?  Pourtant, ce droit-là s'occupe bien de la sphère privée et je ne vois pas au nom de quoi elle le fait...<br /> <br /> Il faudra que vous m'expliquiez un jour, quelle différence vous faites entre l'État n'a pas à sonder les coeurs et les reins, mais il a le devoir de s'occuper de ce qui se passe dans le lit des<br /> citoyens...<br /> <br /> Le mariage civil reste pour moi un droit contractuel, dont l'État n'a absolument pas à se mêler... d'ailleurs dans l'affaire que vous évoquez, sans mariage civil, pas de problème, et les juges<br /> n'auraient pas eu à rendre un arrêt aussi ridicule qu'abusif. Les époux auraient fait un recours devant l'autorité "morale" devant laquelle, ils se sont unis et on n'en aurait même pas entendu<br /> parler.<br /> <br /> En dehors des lois qui sont non négociables (pas de violence, de harcèlement, et cetera), et qui d'ailleurs trouvent leur parfaite justification dans l'ordre public et la protection des<br /> individus, tout le reste c'est du droit abusif qui fait perdurer l'infantilisme.<br /> <br /> P.-S. : j'ai dû me tromper en validant le commentaire, merci de supprimer le précédent parce que je ne sais pas sur quel article je l'ai validé.<br />
M
<br /> <br /> A ma connaissance, l'institution actuelle du mariage civil ne s'immisce pas plus dans le lit des conjoints mariés que ne le fait le droit commun dans celui des autres. On n'a pas tous les droits,<br /> y compris dans le lit, que l'on soit marié ou non. La loi de 2006 a introduit la notion de viol entre époux et écorne donc sérieusement celle de "devoir conjugal".<br /> <br /> <br /> <br /> Et à ma connaissance la contractualisation peut être tout aussi envahissante (et même davantage) que l'institution. Exemple: la clause de fidélité. On reproche souvent au mariage d'imposer cette<br /> clause. Mais un contrat peut faire bien plus que cela. J'ai donné l'exemple de cette déplorable affaire de virginité où l'un des époux ne se contentait pas de l'institution actuelle du mariage,<br /> mais exigeait en outre une fidélité rétroactive de son conjoint : cela pourrait parfaitement entrer dans un contrat privé.<br /> <br /> <br /> <br /> Je pense qu'il faudrait y réfléchir à deux fois avant de réclamer l'abolition du mariage civil - cela reviendrait la plupart du temps à redonner vigueur au mariage religieux, et là bonjour les<br /> contraintes, dans le lit" et ailleurs ! Franchement, je préfère que l'Etat s'en mêle et nous délivre de la tutelle des clercs.<br /> <br /> <br /> <br /> Bon, mais pour apporter de l'eau à votre moulin, voilà un texte sur l'abolition du mariage, avec à la fin une bibliographie intéressante : François de Singly, « Pourquoi nous avons aboli le<br /> mariage. Une eutopie privée », La Vie des idées, 4 novembre 2011. http://www.laviedesidees.fr/Pourquoi-nous-avons-aboli-le.html<br /> <br /> <br /> Et j'ajouterai qu'il y a quelque chose d'un peu comique de voir des homosexuels réclamer le mariage et redorer le blason de cette institution si décriée naguère, y compris et surtout par bien des<br /> militants pour les droits des homosexuels !<br /> <br /> <br /> <br />
R
<br /> Bonjour depuis l´Espagne, Catherine:<br /> <br /> <br /> Je partage tout à fait tes raisonements. Chez nous on utilise souvent la même expression "matrimonio homosexual" ou bien "matrimonio gay". Mais il y a un effort pour parler tout simplement de<br /> "mariage civil". Avec cette expression on reclame, face à une église de temps en temps plus radicale, la souveranité du pouvoir civil pour légiferer. D´une certeine façon il s´agit, en parlant de<br /> la réforme du mariage civil (faite au 2005) de proclamer la laïcité, même si elle est faible chez nous.<br /> <br /> <br /> Au moment actuel on attends savoir qu´est ce qui va faire notre "autorité" gouvernamental... Ce sont pas de beaux temps pour les espagnols et, bien entendu, je ne parle pas d´economie.<br /> <br /> <br /> Merci de ton article. Je t´embrasse,<br />
M
<br /> <br /> Merci Ricardo de rappeler que la notion même de mariage civil est en soi une conquête !<br /> <br /> <br /> <br />
J
<br /> je ne comprends pas la référence à l'inceste dans votre texte ; pouvez-vous préciser?<br />
M
<br /> <br /> Je soulevais simplement la question de savoir comment les formes de la prohibition de l'inceste (caractéristique anthropologique) parfois exprimées en fonction de la différence des sexes dans<br /> la réglementation actuelle du mariage en France seront<br /> abordées dans la formulation des obstacles au mariage entre personnes du même sexe (pour les relations en ligne directe, la formulation "le mariage est interdit entre ascendants et descendants"<br /> est pertinente, mais la relation frère-frère par ex. n'est pas actuellement abordée par la loi et pour cause puisque la loi actuelle exige la différence de sexe). C'est juste une question de<br /> rédaction.<br /> <br /> <br /> <br />
I
<br /> Hum... dubitatif... la vraie évolution ne serait-elle pas plutôt que l'État s'occupe de ses oignons et qu'il abolisse le mariage ??? Que celui-ci disparaisse purement et simplement du Code civil<br /> !<br /> <br /> Je trouve toujours aussi suspect qu'un groupe, quelqu'il soit, réclame des droits qui signent l'emprise de l'État sur les individus...<br /> <br /> Je me faisais justement la réflexion ce matin en lisant un article du Canard sur la désastreuse situation en Syrie... Est-ce vraiment une évolution qui va dans le bon sens que des gens se battent<br /> pour avoir le droit de choisir leur didacture ? Faut-il soutenir cela ?<br /> <br /> Rien que des questions...<br />
M
<br /> <br /> Bah, sur le mariage je reste assez vieux jeu - même si je suis favorable au mariage indifférent au sexe ! Le motif de cet attachement est la crainte, en l'absence d'institution publique, d'une<br /> contractualisation totale (privée) des rapports entre conjoints ce qui conduit à traiter l'humanité comme une marchandise. On a vu cela par exemple avec l'affaire de "l'exigence de virginité" il<br /> y a quelques années  (articles sur Mezetulle : http://www.mezetulle.net/article-20265232.html ;  http://www.mezetulle.net/article-20259636.html )<br /> <br /> <br /> <br />

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