Bloc-notes actualité
Rama Yade lectrice de Mezetulle ?
Le titre du livre de Rama Yade Plaidoyer pour une instruction publique (Grasset) ne pouvait qu'attirer l'attention de Mezetulle. Effectivement il y a de quoi se régaler... et de supposer que Rama Yade a lu Mezetulle, particulièrement certains textes de Jean-Michel Muglioni, de fort près !
L'auteur rappelle opportunément que la politique de destruction de l'école républicaine est menée avec constance et régularité depuis une bonne trentaine d'années aussi bien par la gauche que par la droite, à coups de « réformes pédagogiques » ahurissantes, d'idéologie managériale, d'alignement sur l'animation sociale ; elle tire à boulets rouges sur l'autonomie des établissements chère à F. Fillon. S'agissant de l'université, on déguste la note de la p. 140 qui renvoie dos à dos B. Apparu et V. Peillon, pris la main dans le même sac avec le projet de suppression des classes prépa. Et la liste des anciens ministres « pompiers incendiaires » p. 155 n'est pas en reste - elle se conclut par une double dénonciation sans ménagement qui se prolonge p. 156.
Tout cela pour déboucher sur le voeu d'un énième « grand débat public sur l'école »... duquel on peut attendre tous les travers qui sont précédemment critiqués et où toute tentative sérieuse en faveur de l'instruction, verrouillée par un consensus politique qui s'entend sur le pire, sera dénoncée comme corporatiste, élitiste, réactionnaire et « inadaptée aux nouveaux publics » ou aux « exigences de l'entreprise moderne ». Et cela quel que soit le résultat de la future élection présidentielle, n'en déplaise à Rama Yade.
Qu'un certain sentiment de familiarité m'ait saisie au fil des pages, cela n'a donc rien d'étonnant - mon vieux Condorcet figure même dans la biblio, tout comme le De l'Ecole de Jean-Claude Milner - deux ouvrages dont la 1re édition remonte à 1984 ! Et que le buzz commence à bourdonner sur des thèmes qui traversent un désert politico-médiatique depuis trente ans, on ne s'en plaindra pas, même s'il plonge dans une finale mare aux canards bien tiède et vaseuse.
Cependant, devant certains passages, cette familiarité se fait étrange, empreinte du malaise que l'on éprouve lorsqu'on vit un rêve un peu trop précis. J'ai le sentiment d'avoir lu ça quelque part, hum... ce n'est pas une ressemblance générale, non j'ai lu ça vraiment, mot à mot, à la virgule près. Voyons d'un peu plus près.
Page 64. Il s'agit de la discipline: L'image de la règle signifie qu'au lieu de suivre les fluctuations de l'âme, on se donne une direction et que l'on s'y tient. Cette contrainte est libératrice, car les pensées abandonnées à elles-mêmes, sans règle, ne sont pas libres. Allez, entrons la phrase dans Google, on va bien voir. Et qu'est-ce qui sort en première occurrence ? Mais bon sang, mais c'est bien sûr : l'article de Jean-Michel Muglioni L'éducation par l'instruction, mis en ligne sur Mezetulle le 25 juin 2009 ! La similitude est frappante, c'est le moins qu'on puisse dire!
Je sens que je vais encore me régaler. Page 64 toujours: Prétendre comme certains psychologues officiels que le temps d'attention de l'enfant est très limité est aussi absurde qu'ignorer que l'entraînement permet à tout homme de courir de très longues distances Bingo ! C'est un autre passage du même article (1) !
Allez encore une page (98-99) devant laquelle mon petit doigt me dit quelque chose: N'est-ce pas Maurras qui disait qu'il faut être bourgeois pour apprécier Racine ? Il y a quelque chose de maurrassien dans cette attitude qui consiste à interdire l'accès à la littérature française à des enfants dont les ancêtres ne sont pas français ou bourgeois Et là, super bingo ! Non seulement c'est encore un article de Jean-Michel Muglioni publié le 23 juin 2011 qui sort à la première occurrence, mais Google nous apprend à la deuxième occurrence qu'un commentateur du blog de Malika Sorel avait repris cet article dès le 25 juin 11 (en citant bien sûr la source et l'auteur comme il se doit) ! La suite du texte est également on ne peut plus proche de la rédaction de Muglioni. Mais je laisse le lecteur s'amuser.
Des esprits chagrins monteront sur leurs grands chevaux et se laisseront aller à de gros mots que Mezetulle n'écrit ici qu'en se pinçant le nez et avec force guillemets de distanciation pour bien montrer que c'est impertinent. « Plagiat », « pillage », « larcin » ? Vous croyez qu'on peut dire ça ? Sûrement pas. Ma thèse est beaucoup plus flatteuse. A mon avis, Rama Yade est tellement imprégnée de l'excellente lecture de Mezetulle et des articles de J.-M Muglioni que cela ne peut être qu'une réminiscence, même pas un « emprunt » : dans cette sympathique résurgence on ne peut plus sincère et forcément surgie à l'insu de son auteur, il est bien évidemment impensable de lui reprocher d'avoir oublié les guillemets et une petite note de bas de page (2).
Voir l'article d'Anna Topaloff sur Marianne 2.fr
1 - On peut télécharger les copies d'écran des résultats aux diverses requêtes obtenus juste avant la publication du présent article le 11/11/11/à 11heures (non ce n'est pas une blague!). Requête 1. Requête 2. Requête 3. [Edit 22h55 : il est clair que ces résultats vont forcément changer, rien qu'à cause... du présent article, et surtout à cause du buzz que produisent les reprises sur différents sites web. Ou bien il faut faire les requêtes en limitant la recherche au seul site www.mezetulle.net pour avoir des résultats plus pertinents.]
2 - Mezetulle est sous licence Creative Commons. Les textes peuvent être repris librement aux conditions suivantes : pas d'exploitation commerciale, citation visible de l'auteur et de la source ; pour plus de précisions, voir cet article. C'est gratos !