28 août 2006 1 28 /08 /août /2006 17:15
Bloc-notes
L'épopée des ours dénaturés


Mezetulle ne cache pas sa sympathie pour les éleveurs pyrénéens en général (et ariégeois en particulier) qui dénoncent le prétendu programme de "réintroduction" des ours dans les Pyrénées, et ne peut pas réprimer un sourire devant les dernières nouvelles relevées sur les dépêches publiées par Yahoo et dans un article du Monde superbement intitulé Paloma "tombée pour la France" qui ne manque pas d'ironie :

Palouma, un des cinq ours slovènes lâchés dans les Pyrénées depuis le printemps, a été retrouvé mort samedi  26 août au pied d'une barre rocheuse, près de la commune de Loudenvielle, à 2.800 mètres d'altitude. "Aucune information ne permet" de déterminer si la mort de l'ourse Palouma est "accidentelle ou non", a déclaré samedi soir Frédéric Decaluwe, ingénieur adjoint de l'équipe ours [sic] à l'école vétérinaire de Toulouse où le cadavre a été amené pour une autopsie. [dépêche lue sur Yahoo le 27 août 06]
C'est remboursé par la Sécu ?

Il y a mieux, toujours plus haut, toujours plus fort :
Génération Ecologie, l'ancien parti de Brice Lalonde, n'hésite pas à évoquer l'hypothèse d'un "attentat pur et simple". [Le Monde, édition du 29 août 06]
"Que produira l'auteur après tous ces grands cris ?
La montagne en travail enfante une souris." (1)

Les fomenteurs d'attentat (Mezetulle se contente d'une circonlocution alors qu'il faudrait dire en bon français "les terroristes" non ?) anti-ours auraient en effet, pour perpétrer leur forfait, organisé des "battues d'effarouchement" contre la pauvre bête fauve...
Mais que dire alors des ruées de l'ours sur les brebis ? Les mots nous manquent, et Mezetulle s'essouffle sur de telles hauteurs épiques...

On sait qu'un autre ours slovène avait été lâché sur le territoire de la commune d'Arbas le 22 août en catimini et de nuit. Mais où sont la fanfare et les fanions qui devraient célébrer ce modèle d'opération démocratique ?
Tant de miel clandestin entre-t-il dans l'âme des dévots protecteurs de la faune touristique dénaturée (2) ?

L'article du Monde se termine sur une conclusion
grandiose :
"Nelly Olin [ministre de l'écologie] a en tout cas laissé entendre que plus aucune arrivée d'ours ne serait possible en France "avant l'élection présidentielle" de 2007. "
Comme quoi être lâché dans une urne peut être aussi fatal que tomber dans un ravin. Et ça fait penser à un vieux dicton, c'est comment déjà ? ah oui : "ne pas vendre la peau de l'ours...".
Après tout, le ridicule n'est que du sublime raté.
 

(1) Boileau, Art Poétique, III, v. 273-274 (inspiré d'un passage de Horace, Art poétique, v. 138-139 : "Parturient montes, nascetur ridiculus mus.")
(2) On continue avec Boileau, citation un peu remaniée d'un vers du Lutrin (I, v. 12 "Tant de fiel entre-t-il dans l'âme des dévots ?" lui-même inspiré par un vers de Virgile, Enéide, I, v. 11 : "Tantaene animis caelestibus irae?").
Mezetulle, bien que tout essoufflée, en retrouve du coup son latin.


Sur le bloc-notes le 28 août 2006
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commentaires

L
<br /> <br /> Merci pour votre tolérance à la publication et longue vie aux ours dans les Pyrénées.<br /> <br /> <br /> <br />
L
<br /> <br /> Et bien, avec autant de beaux penseurs et d'arguments sans faille, quel avenir reste t'il aux ours des Pyrénées. Qu'ils disparaissent et nous foutent la paix, à nous être dit supérieurs ? Aprés<br /> on s'en prendra aux loups (c'est déjà en cours) puis à qui ?<br /> <br /> <br /> J'ai honte, profondément honte d'appartenir à l'espèce animale qui a fait le plus souffrir et exterminé les autres espèces animales. Ce ne seront jamais vos belles phrases qui rendront la<br /> l'humanité à l'homme.<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> <br /> D'ordinaire Mezetulle censure sans état d'âme ce type de commentaire, conformément aux principes exposés sur ce blog.<br /> <br /> <br /> Mais dans celui-ci, le mépris envers tout ce qui a une odeur d'argumentation (surtout si elle est "sans faille"!), l'anti-intellectualisme, la moralisation, se manifestent avec une telle candeur,<br /> une telle innocence, une telle spontanéité que je ne résiste pas au plaisir de publier.<br /> <br /> <br /> Je mets à profit ce petit rebondissement, d'abord pour récapituler les textes sur la question dans Mezetulle, outre celui-ci et les commentaires abondants (et très argumentés!) qui le<br /> suivent :<br /> <br /> <br /> http://www.mezetulle.net/article-7019454.html<br /> <br /> <br /> http://www.mezetulle.net/article-24115985.html<br /> <br /> <br /> Ensuite, pour alimenter plus à fond la discussion qui dépasse largement la question de l'ours dans les Pyrénées, je signale les textes du colloque L'homme et l'animal en téléchargement<br /> libre sur le site de la Société française de philosophie :<br /> <br /> <br /> http://www.sofrphilo.fr/?idPage=38<br /> <br /> <br /> <br />
A
@Antoine<br />  <br /> <br /> Alors pourquoi accorder des droits (de ne pas être tortué, tué pour être mangé, etc.) aux nourrissons humains ? La raison qu'on se donne, c'est que le nourrisson est de notre espèce, alors que l'autre (le canard gavé par exemple) est d'une autre espèce<br />  <br /> <br /> En effet. Et ceci n'a rien à voir avec du "racisme", sauf à tout mélanger. le racisme s'adresse à un être humain c'est à dire un alter ego (littéralement : un "autre moi"), c'est à dire un être pensant et raisonnant dans lequel je suis capable de projeter ma subjectivité. L'animal ne peut entrer dans ces catégories car nul ne sait comment il pense et comment il se pense (il faudrait d'ailleurs préciser de quel animal on parle). Le bébé est un être humain, c'est un adulte en devenir, c'est à donc également un alter ego potentiel, ce que n'est pasl'animal.<br />  <br /> <br /> Le fait que celui soit un être souffrant est une toute autre chose et je reconnais volontiers que nous avons des devoirs vis à vis des animaux; mais ceux ci ne sauraient avoir des droits ! Sur ce sujet, j'ai un article très bien argumenté de Pascal Engel, je vous l'enverrez, vous voulez...<br />  <br /> <br /> Par  ailleurs je m'interroge sur la confusion conceptuelle qui amène certains à connoter moralement toute tentative de distinction méthodologique. Le fait de distinguer, de classer, de quantifier est, on le sait à la base de la science, et plus généralement à la base de toute connaissance ordonnée du monde, telle qu'elle se pratique depuis l'antiquité. Il semble que cette pratique soit, par une étrange maladie de l'esprit, devenue insupportable à certaines bonnes âmes qui y voient une insuppportable atteinte aux droits  de l'homme (encore une confusion des genres), comme si le fait de classer était en lui même un jugement de valeur.<br />  <br /> <br /> Enfin, pour ce qui est des fondements philsosophiques des positions à peine ffleurées ici, je vous renvoie aux références abordées par Catherine Kintzler... vous jugerez vous même si c'est solide ou non ;-)<br />  <br /> <br />  <br />  <br /> <br /> <br />  <br />
A
A Annabase qui écrit :>Comment considérer l'animal comme doté de droits per se si on ne lui reconnaît  pas de responsabilités ,puisque doté d'une liberté nulle ou très réduite ?Alors pourquoi accorder des droits (de ne pas être tortué, tué pour être mangé, etc.) aux nourrissons humains ? La raison qu'on se donne, c'est que le nourrisson est de notre espèce, alors que l'autre (le canard gavé par exemple) est d'une autre espèce. Et c'est bien ce que disait Coralie : le spécisme, c'est le racisme de l'espèce. Ce n'est pas parce que notre société est spéciste, que le spécisme est justifié, ni juste.>Je sais l'usage que P. Singer fait de la comparaison des animaux avec les humains handicapés concernant la liberté et la question des droits, >mais je ne la trouve guère convaincante, pour de raisons trop longues à exposer ici...."Raisons trop longues à exposer"... hum hum... ne serait-ce pas plutôt parce que ces raisons sont justement "mal étayées philosophiquement" ?.... (clin d'oeil amical)Antoine
A
@ Coralie Fambrini<br /> Cette notion de "spécisme", j'ai toujours eu du mal à la comprendre, malgré mes lectures (sans doute pas assez approfondies) de Paola Cavalieri et de Peter Singer. Elle me paraît mal étayée philosophiquement. Comment en effet fonder l'animal en tant que sujet ?  Comment considérer l'animal comme doté de droits per se si on ne lui reconnaît  pas de responsabilités ,puisque doté d'une liberté nulle ou très réduite ? Et si la reconnaissance de droits est valable pour les espèces les plus évoluées (Big Ape Project)  , qu'est-ce qui vous empêche de "glisser"  à une reconnaissance de droits pour les espèces les moindres ?  Comment (et pourquoi) rejetter ainsi tout donné naturel ? Est-ce simplement souhaitable ? Je sais l'usage que P. Singer fait de la comparaison des animaux avec les humains handicapés concernant la liberté et la question des droits, mais je ne la trouve guère convaincante, pour de raisons trop longues à exposer ici....<br /> Enfin, j'espère que Catherine Kintzler vous répondra ou abordera ces thèmes, elle le fera sans doute avec autrement plus de force et de pertinence que moi ...<br /> A.
C
Merci Anabase pour cette réponse très argumentée et informée. Je ne vois pas quelle force et quelle pertinence je pourrais trouver en plus des vôtres.. ! J'aurais sans doute rappelé des idées très classiques inspirées des Principes de la philosophie du droit de Hegel sur la notion de personne, de "chose", et le concept hegélien de la "nature". Puis je serais passée à Condorcet, qui explique très bien pourquoi on n'a pas le droit de maltraiter un "être sensible" mais aussi pourquoi seul un "être moral" peut avoir des droits ET des devoirs... mais rien de bien nouveau.Enfin et pour en venir à une des idées principales de votre argumentation, c'est la question de l'indistinction qui est posée. Dans un tout autre domaine j'ai abordé cette question au sujet de l'art et de la musique (La musique comme fiction et comme monde), du mythe d'Orphée magistralement décrypté par Marcel Détienne - Orphée mélange tout, et symptomatiquement il place dans un même monde de charme hommes et animaux . Comme on le sait, le mythe d'Orphée sombre dans la violence.
C
A Catherine Kintzler<br /> Bonsoir, vous écrivez:<br /> "J'hésite toujours à me ranger aux côtés de ceux qui traitent les chiens (et les animaux en général) comme des hommes, parce que cela conduit trop souvent à traiter les hommes comme des chiens."<br /> Cette phrase sonne bien; malheureusement, elle est basée sur quelque chose de faux; car elle signifie en effet: "...parce que cela conduit trop souvent à traiter les hommes comme IL EST NORMAL DE TRAITER des chiens".<br /> Oui j'aimerais un monde où on ne traiterait pas forcément les êtres en fonction de leur espèce. Prendre davantage en considération les intérêts d'un individu juste parce qu'il est humain (par rapport à un chien) est arbitraire, cela s'appelle du spécisme. Cela doit être combattu.<br /> De plus, j'aimerais savoir à quoi correspond le "trop souvent" dans votre phrase. Pour ma part, je milite pour une meilleure prise en compte des intérêts des animaux, c'est-à-dire que je dénonce leur exploitation, leur torture, leur mise à mort, l'utilisation de leur corps. A chaque instant des individus sont brutalisés, maltraités, torturés, assassinés, juste parce que ce ne sont "que des animaux". Ils n'ont pas eu la chance de naître humain, alors on se permet de les tuer, de les manger, de les vivisecter.<br /> Je suis pour ma part très touchée par la souffrance humaine bien sûr (et je n'ai jamais traité un humain "comme un chien", enfin dans le sens que vous donnez à cette expression, car si je devait m'occuper d'un chien ce serait avec tendresse et respect) , tout comme les personnes que je connais et qui se battent aussi pour les animaux. L'intensité de la souffrance d'un individu, sa détresse, sa peur, ne dépend pas de son espèce, mais de ce qu'il subit. Pourquoi fermer son coeur sous prétexte qu'aider les uns (les animaux) reviendrait à ne plus aider les autres...?<br /> J'ai découvert ce blog suite à ma signature à la pétition de soutien à Robert Redeker. Je suis contre tous les intégrismes, contre tous les appels au meurtre ou à la haine.<br /> La barbarie sous toutes ses formes doit être combattue, afin que chaque individu, humain ou non, puisse vivre libre dans ce monde, libre de s'exprimer, libre de profiter de sa vie (de son corps, qui lui appartient) sans se faire massacrer ou vivre dans la terreur. <br /> Les ours, les brebis, comme Robert Redeker.<br />  <br />
Y
...et qui se soucie des ours de l'Arctique qui se noient et se noieront de plus en plus à cause du réchauffement de la planète ?
P
C'est vrai qu'avec cette histoire de "meurtre" d'ours en montagne on atteint les sommets du ridicule. Pour moi l'écologie c'est lutter contre les pollutions, élaborer des normes environnementales, développer le recyclage, bref prendre des mesures en rapport avec le monde d'aujourd'hui et non pas essayer de revenir à un âge d'or de la nature avant l'introduction des bergers  ;-)
D
Une battue à 2800 mètres d\\\'altitude dans le massif près de Loudenvielle, c\\\'est à dire au pied du pic Batoua ou du Lustou ? Eh bien, ce sont de sacrés montagnards les anti-ours parce qu\\\'il faut aller le chercher, là haut ! Quand aux écolos de Génération Ecologie, apparemment, ils n\\\'ont jamais mis les pieds à la montagne... 
C
Ours dénaturé vu avec les yeux de Chimène :
L
petite anecdote de bobo ..."un jeune homme, étudiant en ecologie faisait tous les jours 10km aller retour ( en vélo bien sur ... )pour espérer voir des huppes dans un lieu ou les "zexperts" avaient décrété que l'on en trouvait ... Moi j'en voyais tous les jours dans mon jardin , mitoyen du sien ..."deuxième anecdote ...j'ai été l'un des rares à m'étonner des méthodes de "nettoyage" de bords de rivière, à la pelle mécanique avec arrachages des souches, pratiquée par une association d'insertion dont le président était un élu feldgrau ...J'ai toujours eu  certaines réticences face aux intégrismes mysanthropes ... et je persiste à penser qu'il faudra un jour se poser sérieusement la question du rapport d'une partie de notre société au droit d'usage de l'espace ...
T
etre pour ou contre la réintroduction des ours dans les Pyrénées, on peut en débattre, mais concernant leur danger potentiel, il est inexistant : les ours tuent 50 fois moins de brebis que les autres prédateurs ou accidents naturels !!!!Alors, du moment qu'on a réintroduit ces bestioles qui n'avaient rien demandé à personne, foutons leur la paix. D'autant que les bergers zélés sont largement défrayés quand un ours s'attaque à leur troupeau...
C
L'article ne s'en prend pas aux "bestioles" elles-mêmes, mais d'abord et surtout au ridicule de l'opération, ensuite aussi aux méthodes de la réintroduction. Le précédent commentateur (commentaire n°1) a eu l'heureuse expression "bobos feldgrau" que je trouve parfaitement appropriée, et digne du vers de Boileau "Tant de fiel entre-t-il dans l'âme des dévots". Le bon peuple, c'est connu, ne comprend rien à rien, ne voit pas où est son bonheur, il n'a pas la fibre néoruraliste (en l'occurrence il l'aurait plutôt bucolique et géorgique...). Alors on fera mielleusement et tyranniquement son bonheur malgré lui : on ne lui demande rien à lui non plus, surtout pas qu'il donne son avis. Et s'il râle, on le traite d'âne. Et puis, si on paie grassement chaque brebis égorgée, ne doivent-ils pas être contents ? Qu'est-ce qu'ils ont à dire ? Qu'ils aiment leur métier, lequel consiste à prendre soin des brebis vivantes ? Ouarf, on s'en étouffe encore de rire au fond des bistrots branchés..!J'hésite toujours à me ranger aux côtés de ceux qui traitent les chiens (et les animaux en général) comme des hommes, parce que cela conduit trop souvent à traiter les hommes comme des chiens.Sans compter que c'est une singulière manière de leur "foutre la paix" à ces "bestioles" que de les déraciner de leur territoire naturel pour les introduire dans un milieu auquel visiblement elles ne sont pas adaptées et dans lequel l'espèce est en voie de disparition certaine, nonobstant ces quelques transferts qui, de ce point de vue, ne peuvent être qu'anecdotiques.
L
Aux dernières nouvelles, l'autopsie n'aurait révélé aucune trace suspecte, les prélèvements opérés par les zexperts de la police scientifique  sont en cours d'analyse .......La question que tous les bobos feldgrau se posent est "qui a osé pousser un fauve de  Plus de 200 Kg , capable d'éventrer un randonneur d'une pichenette, en équilibre sur une corniche rocheuse large comme le budget d'un RMISTE"  ? Le ridicule ne tue pas, dommage, celà aiderai bien à résoudre le probléme de surpopulation ...

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