15 juillet 2006 6 15 /07 /juillet /2006 16:31
Bloc-notes
Zidane: le lien footballistique à défaut de lien politique

A lire un article de Robert Redeker.
"Le lien footballistique ne prolonge ni n'enrichit les liens traditionnels, il se développe sur leur affaiblissement, finissant par se substituer à eux en les parodiant l'espace de quelques heures." Telle est la thèse de Robert Redeker dans un article publié par Le Figaro du 13 juillet dont voici la conclusion :

 
Pourquoi donc nos compatriotes contemporains ne condamnent-ils pas l'agression de Zidane contre Materazzi, geste qui, à sa manière, légitime la violence ? Le sport est devenu, à leurs yeux, source de légitimité. La souveraineté qu'ils refusent à la politique, ils l'accordent volontiers au sport et aux sportifs, auxquels tout est toujours pardonné à l'exception des mauvaises performances. Loin d'être une boutade, la banderole «Zidane Président» exprimait l'inversion des légitimités, le sportif supplantant le politique. Zidane est l'icône de ce lien footballistique, le grand prêtre de cette communion. Selon René Girard, la fonction de la violence au sein du sacré est d'assurer la cohésion, de maintenir l'unité fusionnelle d'un ensemble d'humains. Le geste de violence de Zidane prolonge la communion footballistique bien au-delà de l'habituel. Grâce à cette brutalité, la fusion des Français en une unité, autour de la figure de Zidane, dure plus longtemps. Rien, sans importance véritable, le coup de tête de Zidane permet cependant aux Français de jouir un peu plus longtemps du lien remplaçant tous les autres, du fantôme du lien social, le lien footballistique.

Lire l'article sur le site du Figaro
Le site de Robert Redeker est référencé dans la page Liens de Mezetulle (rubrique Littérature, philosophie).
P.S. du 2 octobre : R. Redeker menacé de mort, les mouvements de soutien


sur le Bloc-notes le 15 juillet 06

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commentaires

H
[Ex-commentaire n°2 initialement posté le  05/08/2006 à 21h29.]Rire de certains bavardages des intellectuels n'est certainement pas une attitude anti-intellectuelle - bien au contraire (notez d'ailleurs que dans mon commentaire, je déplorais précisément une absence de pensée.)Ravi d'apprendre que Mr Redeker adore le foot. Mais Je continue de penser que, de la réalité empirique, rien de permet de tirer des hypothèses (et encore moins des conclusions) du type, "Le sport [...] est devenu source de légitimité".Que je fasse erreur ou non sur ce point n'est pas, ce me semble, l'essentiel. Partant du principe qu'être un "intellectuel" n'autorise pas à émettre des opinions grimées en philosophèmes, je me contente de demander que, de ce qu'il avance, Mr Redecker produise au moins quelque démonstration. Dire que le "lien footbalistique" est le "fantôme du lien social", est soit une trivialité (et certes rien n'empêche Mr Redecker de redécouvrir la poudre), soit une proposition qui requiert démonstration (dans le cas qui nous occupe, il faudrait pouvoir montrer, par exemple, que ce qu'il appelle le "lien footbalistique" n'a pas toujours existé sous d'autres formes, mais est bien, pour parler avec Derrida, le "supplément" d'un lien social disparu).Prendre un objet, le football, et "réfléchir dessus", ce n'est pas faire de la philosophie. Pardonnez-moi de trouver irritant le développement de tant de discours qui autour du football, qui conduisent à attribuer à ce dernier à la fois trop, et pas assez - et c'est bien ce qui se passe ici : en voyant un sens éminemment politique aux réactions suscité par le geste de Zidane, on s'empêche de comprendre ce geste (i.e. pas grand chose d'autre que de l'énervement) - et, dès lors, d'émettre, au moins à titre d'hypothèse, l'idée que si les Français ne condamnent pas l'agression de Zidane, c'est tout simplement parce qu'ils l'ont comprise (et, au surplus, parce que Zidane a été sanctionné par un carton rouge). On a ainsi le sentiment qu'en cherchant une signification secondaire complexe, Mr Redecker se détourne de la signification primaire, qui elle, est peut-être simple.Pour résumer mon propos, il me semble qu'en certains cas (celui-ci par exemple), on s'éloigne du vrai à mesure que l'on produit du complexe. Ceci n'est , encore une fois, qu'une hypothèse. Elle part toutefois d'une idée dont je suis davantage assuré, à savoir que Mr Redecker produit de l'opinion, rien d'autre. A l'opinion, j'avoue préférer, parfois, le silence.Veuillez excuser le caractère lapidaire et, par là, quelque peu suffisant, de mon premier commentaire. J'espère avoir précisé mon propos.
C
<br /> [Réponse du 06/08/2006 à 18h09]<br /> <br /> C'est précisément le caractère lapidaire de votre premier commentaire qui m'a donné l'impression d'anti-intellectualisme (d'où le caractère lapidaire de ma réponse....). Impression fausse : j'en<br /> conviens bien volontiers et avec soulagement en vous lisant maintenant. Merci d'avoir dissipé ce malentendu et de mettre la discussion sur de véritables rails.<br /> <br /> Oui je suis tout à fait d'accord avec votre principe : il n'appartient pas à un intellectuel de se précipiter sur le moindre événement pour s'acharner à le convertir coûte que coûte en<br /> "philosophème". Une telle attitude n'est autre qu'un esprit de système et s'expose nécessairement à projeter du "sens" là où il n'y en a pas, ou à utiliser comme Mme Soleil des hypothèses trop<br /> larges qui sont toujours vraies. La figure du "philosophe médiatique" qui se sent tenu de proposer du concept clés en mains partout et pour tout, me semble pitoyable et n'est que trop répandue. On<br /> s'éloigne du vrai non pas forcément en produisant du complexe, mais en produisant des hypothèses trop larges ou trop fortes ou surabondantes : c'est ce procédé (au fond plus grossier que complexe),<br /> me semble-t-il, que vous reprochez à l'article de Redeker sur Zidane. Maintenant il faut voir si ce reproche est vraiment fondé au sujet de cet article, c'est pourquoi j'ai renvoyé au site sur<br /> lequel il est intégralement publié. En tout état de cause, il est certain que votre argumentation intéressera l'auteur.<br /> <br /> En ce qui me concerne à présent :<br /> <br /> 1- J'ai relayé l'article de Redeker parce que j'étais lasse ou atterrée de lire des choses qui ne faisaient pas fonctionner ma pensée sur ce sujet. Car je tiens que ce sujet, cette "sortie" de<br /> Zidane, ou plutôt cette façon qu'il a eue de rater sa sortie, mérite d'être pensée - ce n'est pas "que" du foot. Et je ne me contente pas de la simple explication par la psychologie "il s'est<br /> énervé", "il a pété les plombs", tout simplement parce que c'est un professionnel et qu'une partie de son métier, particulièrement lorsqu'il se sait exposé au regard du monde entier, consiste à<br /> maîtriser ou plutôt à transformer ce moment psychologique - et c'est ce qu'il a magnifiquement fait à la fin du match France-Espagne, sublimer l'énervement et les insultes... en leur mettant un but<br /> au dernier moment ! L'article de Redeker a le mérite de proposer une réflexion, de sortir la pensée de son engourdissement, notamment en s'interrogeant sur le phénomène de fanatisation qui règne<br /> autour du foot, en suggérant que le foot n'est pas toujours "que" du foot. Mais il ne suit pas de cet article que tout et n'importe quoi soit susceptible de stimuler la pensée (c'est un pb que je<br /> me suis posé du reste en ouvrant ce blog). Et bien entendu les hypothèses qu'il y propose ne sont pas, du moins c'est ainsi que je le lis, des dogmes au-dessus de toute critique.<br /> <br /> 2 - Au sujet du sport, j'ai de mon côté quelques idées, sans doute complexes, mais pas forcément pour cela dogmatiques ou systématiques. Elles sont publiées sur ce blog (qui ne se réduit pas à la<br /> forme brève provocatrice "poil à gratter" qu'est le Bloc-notes) : Sur le livre de Perec W ou le souvenir d'enfance et Petite philosophie du<br /> rugby.<br /> ça m'intéresse d'avoir votre avis.<br /> <br /> <br />
H
A la suite d'une erreur de manipulation, les commentaires n°s 1 et 2, avec leurs réponses, ont été effacés. Je les ai récupérés par une autre voie et je les restaure, en indiquant leur date d'origine. Avec mes excuses. Mezetulle*******Commentaire du  01/08/2006 à 10h09Bref, il n'aime pas le foot. "Le sport [...] est devenu source de légitimité". Ne vous vient-il pas à l'esprit, tout simplement, que les gens comprennent ce qui s'est passé - c'est-à-dire (oh mon dieu quelle originalité) qu'un individu puisse s'énerver ? Mais non, il faut que vous donniez un sens politique, une idée de légitimation de la violence.Eh les intellos réveillez-vous, ce n'est qu'un match de foot, et ce n'est qu'un joueur de foot !Et ces histoires, "le sportif supplantant le politique". Réfléchissez au lieu de vous payer de mots. Faire de la "sociophilosophie" c'est bien, mais je crains que cela vous empêche, dans le cas d'espèce, de penser.
C
<br /> Réponse du 02/08/2006 à 16h25<br /> <br /> Je transmets votre commentaire à Robert Redeker. Il sera peut-être étonné d'apprendre qu'il n'aime pas le foot. Heureusement que la clairvoyance anti-intello est là pour nous le révéler.<br /> <br /> <br />
J
En voyant l'article M. Redeker dans le figaro acusant l'islam d'imnombrable absuridités, et principalement de violence, je me permet de douter de la pertinance de ces propos.<br /> mon opignon est qu'il est regit par sa pensée qui elle est fondé sur une sorte de rascisme.<br /> a vous de juger en lisant d'autres article de lui.
C
Allez vite sur le site de Robert Redeker (référencé dans la page liens de ce blog), lisez ses articles sur le sport, la littérature, l'enseignement, la bienpensance, et concluez : cela mérite-t-il la mort ?
J
Savez-vous que les militants de la LCR (Besancenot/Krivine) sont hostiles à la pratique du sport? Il paraît que ça "distrait" les "masses" de la politique ... Moi, je n'ai pas honte d'avouer que j'ai pris du plaisir à regarder les matchs de la coupe du monde.Quant à Zidane, son geste n'est certainement pas glorieux. Il s'en est excusé sur les chaînes de télé. Je ne suis pas non plus béat devant le foot en tant que phénomène de masse. Il peut facilement devenir une sorte de cache-misère. C'est un peu (et même beaucoup!) ce qui se passe en Amérique du Sud.  

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