21 décembre 1970 1 21 /12 /décembre /1970 15:05

Est-il exact que le HCI recommande « l'interdiction du voile à l'université » ?
par Catherine Kintzler

En ligne le 6 août 2013 - actualisé le 8 août


En ce début août, la presse se délecte de la communication d'un avis du Haut Conseil à l'Intégration examinant la question de la laïcité dans les établissements publics d'enseignement supérieur français. Parmi douze mesures, celui-ci préconiserait l'interdiction du port du voile islamique à l'université. Qu'en est-il au juste ?

D'où émane cette communication (1) ? A l'heure où  j'écris ces lignes (6 août), aucun lien ne permet de télécharger le texte définitif de l'avis in extenso afin de se faire une idée exacte de son contenu (2). On ne le trouve pas davantage sur le site même du HCI, dont le secrétaire général Benoît Normand précise qu'il ne devait être rendu public qu'à la fin de l'année.

Mais voilà : ça fuite ! Et la fuite laisse penser que ces têtes brûlées de la mission laïcité du HCI recommandent l'interdiction du voile à l'université ! Bonne occase pour les médias d'agiter un chiffon rouge, mais aussi pour l'Observatoire de la laïcité mis en place récemment de prendre ses distances : non non, la question n'est pas à l'ordre du jour des travaux de cet organisme...
J'ai bien peur d'avoir compris :  c'est plutôt le repli vers une laïcité adjectivée (« apaisée » pour ne pas dire agenouillée) qui serait à l'ordre du jour !

Les plus honnêtes néanmoins se donnent la peine de fournir la citation par où un scandale si opportun devrait arriver. Il se trouve que la préconisation recommande précisément d'interdire
« dans les salles de cours, lieux et situations d’enseignement et de recherche des établissements publics d’enseignement supérieur, les signes et tenues manifestant ostensiblement une appartenance religieuse ».
Nuances de taille. La recommandation porte strictement sur les situations de travail effectif (enseignement et recherche), et ne concerne nullement comme certains le laissent croire les campus ou très vaguement « l'université » en général. Par ailleurs, il n'est pas question de tel ou tel signe en particulier. Cela n'empêche pas Ouest-France, entre autres, de traduire en enchaînant directement (pour ceux qui savent trop bien lire) :  « Autrement dit, l’interdiction du port du voile à l’université ». Ben voyons... pourquoi s'encombrer de détails ?

 

 

Pourquoi je soutiens la proposition telle qu'elle est formulée ci-dessus

 

En 2008, bien avant d'être sollicitée par Alain Seksig (qui a présidé les travaux de la mission laïcité du HCI) pour participer aux réflexions qui ont mené à la rédaction de cet avis, j'avais écrit un article sur le sujet. J'y développais des arguments qui me semblent toujours valides sur les différences entre les établissements publics scolaires et les établissements publics d'enseignement supérieur, arguments qui excluent la transposition telle quelle de la loi de 2004 (interdiction des signes religieux dans les établissements primaires et secondaires) aux établissements du supérieur. Mais j'écrivais aussi, à la fin de ce texte : « Plus particulièrement à l’université, il n’est pas tolérable que, au nom de la liberté d’opinion, le contenu même de l’enseignement - qui est libre et dont tout étudiant peut librement se détourner - soit refusé, infléchi ou remis en question pour être mis sous tutelle. »

Or ma participation aux travaux du groupe de réflexion autour de la mission laïcité du HCI m'a fait connaître des témoignages très alarmants sur la déstabilisation de plus en plus fréquente du travail universitaire par des groupes militants. Dans des cas plus nombreux qu'on ne le croit, la liberté d'affichage - parfaitement reconnue sur l'ensemble des espaces universitaires - est retournée en obstacle contre la liberté même de l'enseignement et de la recherche pendant les cours et séminaires, en présence des enseignants-chercheurs dont le travail est gravement perturbé. Il n'est pas tolérable que des étudiants s'opposent directement à l'étude et à la recherche et tentent d'y imposer une tutelle intellectuelle. Si un enseignement ou un secteur de la recherche leur déplaît, ils peuvent librement s'en désintéresser, ils peuvent librement publier leurs critiques et les motifs religieux ou politiques qui les inspirent, mais ils n'ont pas à rendre impossible l'exercice même du travail universitaire.

A l'école et au lycée, l'enseignement doit être laïque ; cet impératif implique qu'il s'agit aussi de protéger les élèves les uns des autres au sein des établissements : la loi de 2004 s'y emploie en s'appliquant à l'ensemble de l'espace et du temps scolaires. A l'université, l'enseignement et la recherche doivent être laïques : cette fois il serait absurde et abusif de vouloir protéger les étudiants les uns des autres (au-delà de la protection ordinaire due à toute personne) ; aussi n'est-il pas question de restreindre la liberté d'affichage sur les campus ou « à l'université » au sens général. En revanche il faut se donner les moyens de protéger l'enseignement, la recherche et l'indépendance de la science eux-mêmes. Voilà pourquoi je soutiens la proposition du HCI : bornée expressément aux situations effectives d'enseignement et de recherche et en présence des enseignants-chercheurs au travail, je la trouve mesurée et adaptée à la situation.

© Catherine Kintzler, 2013

 

1 - Révélée par un article du Monde daté du 5 août 2013.

2 - [Edit : Note du 8 août]. Le site de l'association Egale a mis une version de travail  du texte en téléchargement dans son éditorial daté du 7 août.

 

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commentaires

T
<br /> "une signalisation (y compris silencieuse) peut être utilisée comme une entrave et un défi -  en l'occurrence comme la proclamation qu'il n'existe qu'une seule parole, qu'une seule autorité<br /> et qu'on n'est présent que pour se fermer à tout autre discours"<br /> <br /> <br /> Bonjour,<br /> <br /> 1 - Qu'est-ce qui vous permet d'affirmer que les étudiantes portant le voiles sont toutes aussi fermées aux idées nouvelles ? Certaines oui, d'autres non. Avez-vous des études sérieuses sur la<br /> question ? J'ai retenu de mes cours de  philosophie qu'il fallait toujours interroger les lieux communs.<br /> <br /> C'est le même type de préjugé que l'on entendait tant parmi les super laïques contre les catholiques pratiquants.<br /> <br /> 2 - Et puis, l'école, l'université sont précisément là pour faire évoluer les représentations des apprenants.<br /> <br /> C'est bien grâce à l'enseignement que dans les familles françaises tant d'enfants de chœur sont devenus des bouffeurs de curé une fois atteint l'âge de raison (c'est ce que répétait mon<br /> grand-père). C'est aussi l'attitude tolérante des enseignants qui facilitera cette évolution.<br /> <br /> 3 - Même si les étudiantes ne sont pas d'accord avec vous, est-ce que cela les empêche d'écouter votre cours, de chercher à le comprendre et à l'assimiler correctement, si elles veulent réussir<br /> leur examen bien sûr, mais aussi par curiosité ?<br /> <br /> 4 - Enfin, si les convictions religieuses peuvent vous déranger en cours de philosophie, je ne vois pas en quoi elles sont un obstacle dans la majorité des disciplines enseignées à<br /> l'université.<br /> <br /> Cordialement<br />
M
<br /> <br /> 1 - Je n'ai jamais affirmé que toutes les femmes portant le voile sont des dogmatiques fermées à toute activité critique. Celles dont vous parlez existent en effet et ne font pas de<br /> difficulté à se séparer de leur voile de manière momentanée. De même que les ecclésiastiques catholiques et protestants se font très discrets pendant les cours - j'ai moi-même enseigné à des<br /> étudiants qui se sont révélés être des religieux du clergé régulier, des moines si vous préférez, et cela ne se voyait pas du tout, tout se passait très bien.  Il semble que vous n'ayez pas<br /> lu la dernière phrase de ma dernière réponse, alors je répète (car vous vous répétez vous aussi !) : déjà, au milieu du XIXe siècle, le rabbin Samson Raphaël Hirsch demandait à ses élèves d'ôter<br /> leur kippa lors des cours d'instruction profane, ajoutant que rien ne doit protéger devant le savoir et qu'il convient de se présenter à lui tête nue. Cessons de faire de l'islam et des femmes<br /> voilées un cas particulier demandant un traitement particulier.<br /> <br /> <br /> Et encore une fois, cet argument a été mille fois avancé pour empêcher la loi de 2004. Une mesure d'interdiction permettrait justement d'introduire très facilement la différence entre les<br /> dogmatiques et ceux qui affichent un signe religieux pour faire obstacle à tout autre discours.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> 2 - Encore un argument mille fois utilisé avant la loi de 2004 pour y faire obstacle. Comme si l'enseignement pouvait tout, et comme s'il n'y avait pas différents régimes de parole. Et l'usage du<br /> mot "apprenant" en dit long.... les pédagogistes qui l'ont inventé prétendent en effet que si les élèves sont rétifs, s'ils perturbent les cours, eh bien c'est toujours la faute des<br /> professeurs. au fond vous n'êtes pas très loin de cette théorie culpabilisante : s'il y a des étudiants qui brandissent un affichage destiné à perturber un cours, eh bien c'est que les<br /> enseignants sont mauvais et ne parviennent pas à se faire entendre... !<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> 3 - On a dit et répété que l'attitude en question consiste à se fermer à récuser toute autre parole que la parole "sacrée" et à ne pas écouter.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> 4 - Aucune conviction religieuse, en tant que conviction et présentée comme telle (et non pas comme une parole dogmatique ayant autorité absolue et devant laquelle tout doit se plier), n'a jamais<br /> dérangé un cours de philosophie. Ce qui dérange un cours c'est de le perturber et d'en empêcher la sérénité.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Je crois qu'à présent on a fait le tour : vos questions reprennent trop souvent des points déjà abordés et auxquels il a été répondu, quand elles ne reprennent pas celles qui ont été mille et<br /> mille fois examinées lors des débats qui ont précédé la loi de 2004.<br /> <br /> <br /> Merci pour votre participation.<br /> <br /> <br /> <br />
T
<br /> Je veux bien croire que mes arguments avaient déjà été avancés en 2004, mais à l'époque je ne suivais pas cette question. Beaucoup sont dans mon cas.<br /> <br /> <br /> En attendant, je ne sais pas si tout simplement vous pourrez répondre à ma question : comment le simple port du hijab, sans aucune autre manifestation verbale non verbale, peut perturber un cours<br /> ? Merci.<br /> <br /> <br />  <br />
M
<br /> <br /> La question "comment le simple port d'un vêtement peut-il perturber le déroulement d'un enseignement?" a été posée ad nauseam avant l'adoption de la loi de 2004, et bien sûr pour lui<br /> faire obstacle. Il faut être bien angélique pour prétendre ne pas comprendre comment une signalisation (y compris silencieuse) peut être utilisée comme une entrave et un défi -  en<br /> l'occurrence comme la proclamation qu'il n'existe qu'une seule parole, qu'une seule autorité et qu'on n'est présent que pour se fermer à tout autre discours. Mais ceux qui n'ont jamais enseigné<br /> (ou qui ne l'ont fait que dans des conditions optimales "aux petits oignons") s'imaginent toujours qu'il suffit, pour le faire, de parler face à un auditoire coopératif ... Vous lirez des<br /> témoignages dans l'avis du HCI lorque celui-ci paraîtra - il en circule déjà en ligne une version de travail que je cite dans l'article.<br /> <br /> <br /> <br /> Je viens d'achever un second livre sur la laïcité, une partie de l'un des chapitres est consacrée à la question de la laïcité dans l'enseignement supérieur, en voici un petit extrait, à titre de<br /> "bonnes feuilles" :<br /> <br /> <br /> <br /> "Il est opportun de marquer symboliquement et concrètement cette exigence de sérénité critique en la distinguant matériellement de la simple liberté qui règle dans les espaces ouverts à la libre<br /> circulation dans les universités. Il apparaît donc souhaitable que les étudiants s'astreignent à marquer cette propriété particulière de l'espace critique en s'abstenant, dès qu'ils participent à<br /> un travail universitaire en présence d'enseignants ou de chercheurs (cours, travaux dirigés, travaux de laboratoire), de manifestations et de signalisations religieuses ou politiques<br /> ostentatoires dont la nature même se présente comme une volonté d'infléchir les conditions de la transmission et de l'élaboration du savoir."<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Et au sujet de la sérénité de l'espace critique commun nécessaire au déploiement de l'enseignement et de la recherche, je vous donnerai juste cet exemple à méditer : déjà, au milieu du XIXe<br /> siècle, le rabbin Samson Raphaël Hirsch demandait à ses élèves d'ôter leur kippa lors des cours d'instruction profane, ajoutant que rien ne doit protéger devant le savoir et qu'il convient de se<br /> présenter à lui tête nue<br /> <br /> <br /> <br />
T
<br /> Bonjour,<br /> <br /> <br /> Merci pour vos réponses qui sont toutefois très surprenantes.<br /> <br /> <br /> Pour la première remarque, effectivement, il y a mille moyens de perturber un cours par la « communication non verbale » ! Mais la proposition n'est pas de sanctionner davantage les comportements<br /> perturbateurs, ce qui se comprendrait. Elle est d'interdire le port d'un habit. Or, vous qui avez enseigné, en quoi une étudiante portant le hijab, ou la cornette peut perturber votre cours ?<br /> <br /> <br /> Pour la seconde remarque, il a souvent été répété que trop de loi tue la loi, trop d'état tue l'état, qu'une loi devait être applicable et juste... Doit-on sévèrement réduire la liberté de toutes<br /> les étudiantes voilées ; des sikhs, des juifs portant la kipa... Si seulement une petite minorité est concernée ?<br />
M
<br /> <br /> Il n'est nulle part question d'un habit dans la proposition, pas plus qu'il n'en est question dans la loi du 15 mars 2004.<br /> <br /> <br /> Sur le dernier point : à ma connaissance les lois sanctionnent des contraventions qui sont le fait d'une minorité... (je parle de contravention car en l'occurrence on ne dépasse pas ce niveau).<br /> <br /> <br /> Pour le reste, la discussion a été déjà menée depuis 1989 : vous reprenez exactement les mêmes arguments que ceux qui ont été utilisés avant la loi de 2004.<br /> <br /> <br /> <br />
E
<br /> Pourriez vous expliquer plus précisément en quoi consistent les comportements que vous évoquez dans la phrase ci dessous?<br /> <br /> <br /> "Dans des cas plus nombreux qu'on ne le croit, la liberté d'affichage - parfaitement reconnue sur l'ensemble des espaces universitaires - est retournée en obstacle<br /> contre la liberté même de l'enseignement et de la recherche pendant les cours et séminaires"<br />
M
<br /> <br /> Je me permets de vous renvoyer au commentaire précédent, qui pose une question analogue et à la réponse.<br /> <br /> <br /> <br />
T
<br /> Bonjour,<br /> <br /> <br /> 1 - Je rejoins Jean C parce que je ne comprends pas votre argument : "il se trouve que c'est la liberté d'affichage elle-même qui est mobilisée à titre d'obstacle". Ce n'est pas par mauvaise foi<br /> ! Nous avons mieux à faire que de chercher à avoir le dernier mot !<br /> <br /> <br /> Mais sincèrement, je ne comprends pas comment dans une salle de TD, de TP,  ou un amphithéâtre, le fait de porter un voile peut être un obstacle au cours.<br /> <br /> <br /> 2 - D'autre part, ce qui est gênant dans le rapport du HCI c'est qu'il ne quantifie pas le nombre de difficultés liées à des manifestations religieuses. Il ne faudrait pas en effet que les<br /> agissements d'une minorité conduisent à sanctionner une majorité qui reste discrète.<br /> <br /> <br /> 3 - J'ajoute que des exemples concrets m'ont été rapportés. Des étudiant(e)s allergiques aux signes religieux ont changé leur regard pour voir les étudiantes voilées pour ce qu'elles sont, pour<br /> apprécier leurs qualités, et non pas seulement à travers leur habit.<br />
M
<br /> <br /> Sur le point 1. Cet argument a été avancé mille fois avant l'adoption de la loi de 2004 sur le port des signes religieux à l'école. Ayant moi-même enseigné pendant toute ma carrière aussi bien au<br /> niveau secondaire que dans l'enseignement supérieur, je connais assez bien les manières dont on peut faire obstacle à un cours. Mais ayant été vous-même élève, vous le savez aussi.. à moins<br /> d'avoir été très très sage (et d'avoir toujours été dans des groupes eux-mêmes très très sages) !<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Sur le point 2. Vous comprendrez que sur ce point je ne peux pas aller au-delà de ce qu'écrit cet avis - ayant fait moi-même partie du groupe de réflexion sur la laïcité comme je le dis dans<br /> l'article. Les témoignages existent - l'avis ne les cite pas de manière identifiable en effet et c'est une précaution élémentaire facile à comprendre. Maintenant, on peut toujours faire la<br /> politique de l'autruche et dire que le problème n'existe pas ou le minimiser, etc. : cela ne s'arrangera pas tout seul. Par ailleurs on n'a aucun problème avec "la majorité qui reste discrète" et<br /> qui en vertu même de cette discrétion ne verrait peut-être pas d'un si mauvais oeil qu'on donne un coup de frein aux agissements d'une "minorité" tapageuse qui en outre prétend à la<br /> "représentativité".<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Sur le point 3. Heureusement qu'une personne humaine n'est pas réductible à ce qu'elle affiche ! Et l'argument peut donc se retourner. J'attire votre attention sur le fait que la proposition ne<br /> vise nullement l'affichage religieux à l'université en général, mais seulement en situation effective de travail.<br /> <br /> <br /> <br />
J
<br /> <br /> Bien qu'entièrement d'accord avec les principes de la laîcité (sans adjectif) à l'école, j'avais été gêné par les termes de la loi de 2004 sur les "signes religieux ostensilbes", d'abord parce<br /> qu'en bon français on aurait dû parler de "signes ostentatoires" (c'est un acte et non un objet qui peut être ostensible) mais surtout parce que ostentatoire ou ostensible renvoient à une<br /> intention alors que la loi n'a à connaître que des faits. Et c'est donc "visible" qui eût été de toute évidence le terme approprié puisqu'il renvoie à un constat et non à un jugement.Que le voile<br /> soit très visible et la croix plus discrète ne change rien à leur nature religieuse et  la formulation de la loi risquait fort de cibler une religion précise, l'islam, ce qui est<br /> contradictoire avec le principe de laîcité que la loi prétendait défendre. Mais bon, cette loi a l'air de marcher, et le débat, provisoirement, est clos. <br /> <br /> <br /> Mais avec la question que vous soulevez de l'extension de l'interdiction à certains espaces universitaires on se trouve dans un autre contexte. Dans les années 60, on rencontrait des religieuses<br /> catholiques dans les amphis, avec leur cornette et leur vaste robe longue, et elles suscitaient de la curiosité voire pour les plus anticléricaux de l'énervement ou de l'ironie, mais pas plus. Ce<br /> n'était pas un attentat contre les principes de la vie universitaire. <br /> <br /> <br /> Maintenant, avec l'apparition du problème de l'islam prosélyte, on se trouve d'après ce que vous dites confronté avec des panneaux d'affichage ou des demandes d'étudiants visant à infléchir le<br /> contenu de certains enseignements ou recherches. ce qui est bien sûr absolument inacceptable. Mais ce genre de pression a existé à certaines époques, et c'était un devoir à la fois collectif et<br /> individuel pour les enseignants que d'y résister, et il en est de même aujourd'hui. A la moindre pression c'est aux enseignants qu'il revient de réagir individuellement ou collectivement et je ne<br /> vois pas bien ce qu'une loi "anti-voile" pourrait ajouter. <br /> <br /> <br />  <br />
M
<br /> <br /> Sur la question lexicale, je partage votre analyse, ainsi que sa conclusion : basta !<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Pour les espaces universitaires, j'ai fait part de mes hésitations dans un article de 2008 auquel je renvoie ; j'ai écrit ensuite cet article du 6 août 2013 en partie pour exposer les raisons qui<br /> ont infléchi ma position depuis, il s'agit en réalité de constatations, la situation n'est plus la même et je pense qu'il serait à présent dommageable de ne rien faire.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Je pense avoir répondu à l'essentiel de votre argumentation sur l'inopportunité d'une interdiction des signes dans mes réponses au commentaire n°1 ci-dessus et au commentaire précédent. Cettte<br /> argumentation a en effet été mille et mille fois avancée et récusée lors du débat qui a précédé le vote de la loi de 2004. C'est précisément parce qu'il n'appartient pas aux enseignants de réagir<br /> en tant que tels - encore plus fragiles que les enseignants du secondaire vis-à-vis d'une administration universitaire toujours prête à les lâcher, encore plus exposés aux pressions (quand ce ne<br /> sont pas des menaces) de certains étudiants - qu'une mesure claire et générale me semble nécessaire.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Enfin, je précise qu'il n'y a jamais eu et qu'il n'y aura jamais - tant que la République française sera un Etat de droit - de "loi anti-voile". Cette expression n'est pas seulement mythique,<br /> elle est préjudiciable à la laïcité.<br /> <br /> <br /> <br />
T
<br /> " la liberté d'affichage - parfaitement reconnue sur l'ensemble des espaces universitaires - est retournée en obstacle contre la liberté même de l'enseignement et de la recherche pendant les<br /> cours et séminaires, en présence des enseignants-chercheurs dont le travail est gravement perturbé. "<br /> <br /> <br />  Si des étudiants perturbent un cours, ils doivent être sanctionnés pour ce qu'ils ont fait. Mais ce n'est pas leur copine portant le voile qui doit l'être. Ce que je ne comprends pas c'est<br /> comment en interdisant aux étudiantes de porter un voile vous changerez les oppositions d'étudiants à un enseignement.<br /> <br /> <br /> Mais<br />
M
<br /> <br /> Une partie de la réponse à votre remarque est précisément dans la citation que vous faites de l'article : il se trouve que c'est la liberté d'affichage elle-même qui est mobilisée à<br /> titre d'obstacle. Il est donc vain, au point où en sont les choses, de vouloir distinguer "le comportement" et "l'affichage". Je le dis dans l'article : c'est précisément le sens des témoignages<br /> que j'évoque et qui ont fini par lever mes hésitations.<br /> <br /> <br /> Vous semblez considérer que seuls les étudiants, à l'exclusion des étudiantes ("leurs copines") sont aptes à perturber gravement un cours. C'est une erreur.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Enfin s'agissant de l'argument général "ce n'est pas en interdisant des signes, etc.", il lui a déjà été répondu mille et mille fois depuis plus de vingt ans, mais ça ne fait rien : on reprend<br /> les mêmes arguments comme si le débat n'avait pas eu lieu, comme s'il n'avait pas été résolu, et comme si la solution n'avait pas été efficace. J'ai ici même répondu en ce sens au commentaire n° 1 ci-dessus.<br /> <br /> <br /> Attention : je ne dis pas dans mon article qu'il faut transposer la loi de 2004 telle quelle à l'université et je dis pourquoi. Mais le débat sur l'interdiction des signes en tant que telle est<br /> de même nature, c'est pourquoi je vous renvoie à ce qui est maintenant devenu presque de l'histoire ancienne !<br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> Bien entendu, vous et moi avons lu la loi et savons qu'elle ne désigne pas tel ou tel accessoire précis, mais une catégorie générale de signes religieux ostentatoires. Il n'en reste pas moins que<br /> le débat, tel que mené dans les médias, l'est autour du « voile ».<br /> <br /> <br /> Prenez par exemple cet article du Figaro : le<br /> titre parle de « voile », le texte parle d'« interdiction du foulard islamique ». Or, vous le dites vous-mêmes, on parle d'étendre une interdiction de « signes religieux ostentaroires » qui<br /> s'appliquerait aussi bien aux kippa.<br /> <br /> <br /> Quand quelqu'un entend parler de « femmes voilées », en général il pense à une femme dont le visage est entièrement dissimulé, comme cela est courant dans la péninsule arabique (ce qui est<br /> récemment interdit sur la voie publique en France).<br /> <br /> <br /> Il me semble par ailleurs curieux que le ministre de l'intérieur se mêle des règles disciplinaires en vigueur dans les établissements d'enseignement supérieur (c'est le domaine de la ministre de<br /> l'enseignement supérieur). On pourrait avancer qu'il pourrait s'agir de droit pénal, mais alors ce serait du ressort de la ministre de la justice.<br /> <br /> <br /> Cette cacophonie (on ne sait pas très bien de quoi les uns et les autres parlent, et à quel titre) n'est guère propice à un débat éclairé.<br />
M
<br /> <br /> La façon dont l'information a été présentée n'est effectivement guère propice au débat. Il s'agissait plutôt d'enterrer la question. Je souhaite bien sûr qu'il ait lieu, et Mezetulle<br /> tâche d'y contribuer...<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Le ministre de l'Intérieur est avant tout un politique... et se conduit comme tel. Il est intéressant que, en tant que politique, il ait jugé opportun de faire connaître son avis. Sa ligne<br /> générale - incluant ce sujet mais pas seulement - me semble être (pour le moment, mais bien sûr cela peut changer !) : "Ne laissons pas le FN s'emparer de telles questions". En tout état de cause<br /> son intervention a eu pour effet de ne pas laisser s'installer l'édredon bienpensant toujours prêt à étouffer ce type de problème, de maintenir la brèche ouverte par laquelle peut s'introduire un<br /> débat et de montrer qu'il y a division à gauche sur le sujet. Et le débat a tout intérêt à ce que les divisions soient explicites.<br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> éAu passage, les uns et les autres devraient clarifier ce qu'ils entendent par « voile ».<br /> <br /> <br /> Pour certains, c'est un foulard ou autre coiffe sur les cheveux, pas différent dans le principe de ce que portent les religieuses catholiques, ou encore le fichu porté sur les cheveux par les<br /> femmes dans certaines régions françaises (est-ce que cela se fait encore, p.ex. en Corse, pour les femmes âgées ?).<br /> <br /> <br /> Mais si l'on prend la compréhension la plus naturelle de « voile », il s'agit d'une étoffe qui masque la plus grande partie du visage, avec des fentes pour les yeux. C'est l'image que m'évoque le<br /> terme « femme voilée ». J'en ai vu au Qatar, aux États-Unis, au Portugal (dans une conférence scientifique !), mais il me semble jamais en France et encore moins sur un campus.<br />
M
<br /> <br /> Les discussions sur la définition d'un voile ont eu lieu ad nauseam depuis 1989, au moment de la "première affaire". La question ne porte pas sur la notion de voile, mais sur celle de<br /> "signe religieux ostentatoire"; or la loi du 15 mars 2004, dont certains avaient prédit qu'elle serait inapplicable, a clarifié la situation dans les établissements publics primaires et<br /> secondaires - elle s'applique notamment aux kippas on l'oublie trop souvent.<br /> <br /> <br /> Cela fait à présent près de 20 ans que j'entends que la meilleure manière de résister aux tests mis en place par des mouvements intégristes anti-républicains est de nier le problème, de dire<br /> qu'il n'y a pas de problème, ou de dire qu'un interdit serait inapplicable faute de bonnes définitions, qu'on va provoquer des troubles, etc. La réalité est que l'interdit marche très bien, du<br /> fait qu'il est général et ne "stigmatise" aucun groupe particulier et aussi du fait qu'il est soutenu par la population. De plus, ne pas agir c'est encourager ces visées antirépublicaines et<br /> offrir la laïcité en cadeau au Front national.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Pour le masque intégral, il est interdit de manière générale (loi du 11 octobre 2010) parce qu'il est un masque et non pas parce que certains masques sont portés en signe d'appartenance<br /> religieuse. La loi ne fait aucune allusion à un signe religieux. Cela concerne par exemple les cagoules (portées en dehors d'obligations professionnelles), et pas seulement le voile de type<br /> "niqab". Ce n'est donc pas une question de laïcité, mais d'ordre public. Il y a eu plusieurs articles à ce sujet sur Mezetulle, voir par exemple ici.<br /> <br /> <br /> Vous n'avez pas vu de femme entièrement masquée par un voile intégral : cela est normal à présent puisque la loi du 11 octobre 2010 interdit les tenues "destinées à dissimuler entièrement le<br /> visage" dans tout espace accessible au public. De mon côté, j'en ai vu tout de même plus que quelques-unes (mais vu leur tenue, je ne pourrais jurer qu'il s'agissait de femmes) avant la mise en<br /> vigueur de cette interdiction.<br /> <br /> <br /> Enfin, la proposition du HCI en question ne porte pas sur les campus universitaires, mais uniquement sur les salles de cours et de séminaires et il n'y est pas question de voile, mais de signes<br /> religieux ostentatoires.<br /> <br /> <br /> <br />

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