25 mars 2010 4 25 /03 /mars /2010 10:22
Bloc-notes
Jean-Louis Borloo et la langue entrepreneuriale

En ligne le 25 mars 2010

L'interview de Jean-Louis Borloo par Jean-Pierre Elkabbach sur Europe 1 le 25 mars à 8h37 est pleine d'enseignements. Les analyses du ministre ne manquent sans doute pas d'intérêt politique. Mais le plus intéressant et le plus révélateur, c'est la langue qu'il emploie, spontanément, tout naturellement.

S'agissant du rassemblement d'une famille politique socio-écolo-libérale qu'il appelle de ses voeux, J.-L. Borloo déclare  :

Ce n'est pas un problème d'écurie. [...] La question est de savoir si des gens qui ont un certain regard sur la société, qui considèrent que les ressources humaines du pays sont plus importantes que des mesures qui viennent d'en haut, qui considèrent que la consultation est un mode de management supérieur à la décision imposée, qui considèrent que la décentralisation est un acte majeur, qui sont Européens, qui sont écologistes, sont capables de bâtir un projet de société

Mais bien sûr que les gens qui pratiquent les « ressources humaines » et la consultation comme « mode de management » sont capables de bâtir un projet de société ! Ce n'est d'ailleurs pas un projet, mais une réalité bien tangible. Nous l'avons sous les yeux tous les jours : une société sur le modèle entrepreneurial, où la force de travail est un gisement de « ressources » et où  la « consultation » est un « mode de management » - c'est-à-dire rien d'autre qu'une manière de faire croire aux gogos que la décision qu'on a déjà arrêtée en haut lieu et à leurs dépens, c'est la leur !
Mais bien sûr que c'est un mode de management, puisqu'il n'y a évidemment qu'une seule politique possible ! Celle où par exemple où il est tout naturel que les profits soient privatisés et les pertes socialisées, où, autre exemple, on vous présente toutes les combinaisons possibles pour le financement des retraites - toutes les combinaisons d'une seule hypothèse, la seule hypothèse envisageable, celle qui exclut d'accroître les contributions issues des profits. Devant de telles « nécessités », on ne peut que tenir le langage d'un très réaliste chef d'entreprise - oops, pardon, d'une équipe de managers soucieuse de faire prendre ses décisions par ceux mêmes qui en sont les victimes et les payeurs après les avoir persuadés, ces gogos, qu'il n'y a rien d'autre à faire.

En revanche, ce qui devient un projet, c'est une association politique où la consultation démocratique serait, non pas un mode de management, mais une forme d'autorité. La seule autorité possible ?

Ecouter l'intégralité de l'entretien sur le site d'Europe 1.

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